Avec François, C`est L`atmosphère D`une Église entièrement Nouvelle - Entrevue avec Martin Mosebach
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Avec François, C`est L`atmosphère D`une Église entièrement Nouvelle - Entrevue avec Martin Mosebach

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Message  Ginou Saliba Lun 1 Juin 2015 - 13:24

Une Entrevue de Martin Mosebach




«Ce qui est préoccupant, au sujet de François, c'est cette atmosphère d'Eglise entièrement nouvelle»

Romain Leick et Walter Mayr
Der Spiegel (via rorate-caeli, ma traduction)
23 mai 2015
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SPIEGEL: M. Mosebach, vous avez passé la dernière année à Rome. Avez-vous réussi à vous connecter à l'enthousiasme général pour ct Pape?
Mosebach: Je me souviens du moment, en Mars 2013, où un cardinal informait les foules qui attendaient qu'un nouveau pape avait été élu, qui s'appelait François. A ce moment, j'ai su à quel problème l'Eglise allait faire face .

SPIEGEL: Parce que le nom était lui-même un programme - la pauvreté et l'humilité à la place de la parure et du pouvoir?
Mosebach: Oui, François d'Assise est tout simplement la contre-figure absolue de la papauté: l'antagoniste de l'Eglise institutionnalisée. Il n'a jamais voulu être lui-même un membre de la hiérarchie. Il était profondément fidèle à la hiérarchie, mais il représentait en lui-même, pour ses moines et moniales un modèle complètement différent, un modèle anarchique. Il oeuvra sous Innocent III, quelqu'un qui recherchait le pouvoir, qui attachait une grande importance à la hiérarchie et à l'autorité.

SPIEGEL: François pape porte en lui-même une contradiction, rien que par son nom?
Mosebach: L'Église, qui est constituée de nombreuses oppositions, vit aussi dans les oppositions entre le Pape et François d'Assise. C'est fécond pour l'Eglise. Elle a besoin des institutions, et des chrétiens anarchiques. Mais ces deux pôles ne peuvent pas coexister dans une seule personne.

SPIEGEL: Peut-être était-ce l'intention du Pape: montrer depuis le début qu'il veut ramener l'Église en arrière, plus près des fondements?
Mosebach: Vers quels fondements? L'Eglise doit toujours revenir aux fondements parce qu'elle est une institution historique et se réfère à un moment spécifique - la «plénitude des temps» où Jésus est venu. Elle doit toujours faire tout son possible dans ce sens, car il s'agit de préserver l'essence de la foi. A l'heure actuelle, nous sommes préoccupés par une réduction de la religion: sa dimension transcendantale menace de devenir invisible. Et cela signifie que les fondements qui sont compris comme l'état actuel de la société ne sont pas les fondements de l'Église.

SPIEGEL: Cela suggère un retour aux origines. L'Église primitive était en effet un mouvement des pauvres, des faibles, des opprimés et des étrangers.
Mosebach: La phrase «Les pauvres sont les trésors de l'Église» s'applique à l'histoire de l'Eglise. Jésus-Christ a aimé les pauvres mais pas comme ceux qui s'opposent aux riches, plutôt comme ceux qui portent des fardeaux plus petits et peuvent plus facilement se tourner vers le Royaume de Dieu. Jésus a incité les riches à devenir pauvres, pas les pauvres à devenir riches.

SPIEGEL: Et pourquoi ne croyez-vous que ce soit un programme pour la papauté?
Mosebach: Ce qui est préoccupant chez le pape François, c'est l'atmosphère qu'il crée - comme si une Église entièrement nouvelle avait été créée, qui n'a jamais existé auparavant de cette façon. Comme si François corrigeait des siècles de développement anormal et créait un nouveau type d'Eglise sans dogme, sans mysticisme. Une Eglise qui se trouve en conformité avec le consensus social actuel.

SPIEGEL: Vous êtes inquiet de l'assimilation avec l'esprit du temps?
Mosebach: À tout le moins, François va dans cette direction. Et il permet à cette assimilation de progresser, en étant ambigu dans ce qu'il dit. Tout cela semble être systématisé.

SPIEGEL: Mais le public apprécie ses déclarations claires.
Mosebach: Prenez juste le commentaire de François, que les catholiques ne devraient pas se reproduire comme des lapins. Beaucoup de rires et de plaisir pour une simple remarque. Mais aussi un commentaire ambigu sur la question de la contraception, qui peut être interprété comme très puritain aussi bien que très permissif. Il jette en l'air des commentaires percutants et provoque avec eux un enthousiasme spontané car cela semble si informel, donc non papal, donc non-curial. Et après, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a la tâche ingrate de réparer en quelque sorte les dommages et d'expliquer comment il faut comprendre ces commentaires, selon l'enseignement de l'Église. L'Église n'est pas libre dans Son enseignement, après tout.

SPIEGEL: Peut-être que François s'est lui-même assigné exactement cette tâche - dynamiter la tradition et ses gardiens, la curie?
Mosebach: Mme Merkel peut changer le programme de son parti quand elle trouve qu'il est avantageux de le faire, mais le Pape est lié par la Tradition. Il ne peut pas s'en écarter, même d'un millimètre. Seulement alors, seulement dans cette mesure, il est le Pape. Il est pas libre. Il doit prendre soin de la continuité de la Tradition. C'est sa tâche principale.

SPIEGEL: Mais un pape peut venir avec quelque chose de nouveau?
Mosebach: Des figures comme François d'Assise, des fondateurs d'ordres, des mystiques ... ils peuvent explorer la religion dans tous les sens et prendre beaucoup de risques. Le pape ne peut pas.

SPIEGEL: La théologie est-elle le point faible du pape François?
Mosebach: Je pense qu'il n'est tout simplement pas intéressés. Je dis cela franchement et le plus aimablement possible. La théologie scientifique dans les universités a beaucoup contribué à la désintégration, la désensibilisation à la foi au XXe siècle. Plus personne n'est satisfait de la théologie. Mais la simplicité de François ne s'ouvre pas nécessairement à une alternative à la théologie.

SPIEGEL: Incluez-vous également son style dans cela - la renonciation aux chaussures rouges, à la croix d'or et ainsi de suite?
Mosebach: Naturellement il y a une critique de son prédécesseur en faisant cela. De toute façon, cela a cet effet fatal qu'il semble désormais que la tenue du pape est juste une question de goût. Mais ce n'est pas le cas. Se soumettre à l'Offoce signifie aussi incontestablement prendre les vêtements qui appartiennent à l'Office. Le pape idéal doit porter sur lui les insignes qu'implique son Office avec dévotion, comme un prisonnier porte la combinaison de forçat.

SPIEGEL: Francis embrasse ouvertement (publiquement) Benoît (??). C'est sûrement un signe de respect. Ou doit-il simplement l'ignorer?
Mosebach: Ce serait approprié et en aucune manière offensant. Parce qu'un Pape retiré n'existe en réalité plus. Il n'a pas la liberté qu'ont tous les autres catholiques de s'exprimer librement. Mais même si Benoît était mort, il serait irrévérencieux de se séparer de lui de façon si ostensible. Celui qui fait tout différemment envoie également un signal clair que ce qui était avant lui était erroné.

SPIEGEL: C'est ainsi qu'on voit les choses, même en Allemagne, où le pape Benoît XVI a été vu de façon si critique.
Mosebach: Les Allemands sont un peuple hystérique, leurs réactions fluctuent toujours aussi irrationnellement. Au début il y a eu «Nous sommes Pape» et à la fin le pape était devenu une non-personne (ndt: ce n'étaient sans doute pas les mêmes...). Déjà en tant que cardinal de la Curie, Benoît avait maintenu une position d'opposition définitive, face aux évêques allemands, sur certaines questions, telles que les centres de conseil sur l'avortement. Ils se sentaient réprimandés. Aucun amour ne s'était développé. François est moins intéressé par l'Église allemande.

SPIEGEL: Que veut ce Pape?
Mosebach: Il est très difficile de parvenir à des conclusions concrètes sur la base de ses commentaires et de ses actions. Ce pape crée un état d'esprit, il crée une certaine atmosphère. Mais l'atmosphère n'est pas la doctrine. Ce fut très révélateur de l'entendre dire: «Qui suis-je pour juger?» Une belle phrase, une phrase apostolique, mais qu'il ne peut pas dire comme Pape.

SPIEGEL: C'est l'une des phrases qui ont suscité une grande approbation.
Mosebach: Naturellement! Le public aime le ravissement brumeux. Le dogme se fane, la montagne dogmatique est à présent dans les nuages et nous vivons sur la Terre tous si enjoués, et ne la voyons pas si austère.

SPIEGEL: Mais le cœur du message évangélique - l'incarnation de Dieu, le sacrifice sur la Croix, le salut - demeure inébranlable.
Mosebach: L'incarnation de Dieu, l'incarnation du Créateur, est un trait distinctif entre la foi chrétienne et les autres religions. Échanger les places du Créateur et de la Création en un seul grand roque (ndt: Le roque est un déplacement spécial du roi et d'une des tours au jeu d'échecs. Le roque permet, en un seul coup, de mettre le roi à l'abri tout en centralisant une tour, ce qui permet par la même occasion de mobiliser rapidement cette dernière. Il s'agit du seul coup légal permettant de déplacer deux pièces, sans respecter le déplacement classique du roi et de la tour de surcroît - fr.wikipedia.org) Telle est la spécificité du christianisme. Même les adversaires philosophiques de l'Église se nourrissent de cela.

SPIEGEL: Comment cela?
Mosebach: Il est question de rien moins que la déification de l'homme. L'anticléricalisme des Lumières avec ses idées d'autonomie de l'homme n'est pas autre chose qu'une hérésie chrétienne.

SPIEGEL: Les Lumières aussi, la venue de "l'âge de l'homme", dépendent de la révélation chrétienne?
Mosebach: Les Lumières sont complètement inconcevables sans le christianisme. Voilà pourquoi il est si étrange également de déplorer l'absence de Lumières dans les autres religions. Le motif de l'incarnation est la condition préalable pour les Lumières.

SPIEGEL: Le Pape pourrait-il lui aussi voir les choses de cette façon?
Mosebach: Il éviterait probablement le mot «hérésie».

SPIEGEL: Il se conduit plutôt comme le patron d'une organisation mondiale à but non lucratif (une ONG).
Mosebach: Mais il ne l'est pas. Le Pape n'a pas besoin de se préoccuper des votes, même si ce genre d'approbation soutient actuellement l'autorité de François. J'ai parfois le sentiment que François impose sa marque au détriment de l'Eglise. Par exemple, il traite les évêques avec une rudesse si extraordinaire. Si le pape Benoît avait fait la même chose pour un évêque individuel, il y aurait eu un tollé. Conformément à la loi catholique, un évêque tient son office du Christ et non du Pape; il devrait avoir un statut juridique très fort vis-à-vis du Pape.

SPIEGEL: François cherche-t-il une épreuve de force au sein de la machine Eglise?
Mosebach: Nous avons un pape qui, d'une part, invoque une Église tendre, d'autre part réagit très fortement et interfère dans les diocèses. Pour le public, cela ressemble à ceci: Voici le Pape dynamique, non conventionnel, courageux, avec un coeur d'or; et voilà la machine encroûtée, morte, sans foi, rigide. Mais ce n'est pas si simple.

SPIEGEL: Son dur jugement sur la curie, dans lequel il reprochait aux cardinaux la maladie d'Alzheimer spirituelle et leur matérialisme, sonnait comme une déclaration de guerre.
Mosebach: Oui. Imaginez le rédacteur en chef du Spiegel tenant à ses chefs de service un tel discours.

SPIEGEL: Les cardinaux ont toléré le discours en restant étonnamment impassibles.
Mosebach: Dans la Curie il y a une capacité linguistique élevée de tenir à l'écart la phrase à scandale. Le discours de François était un gros morceau. Comme dans toute société il y a des figures douteuses, dans la Curie, mais il y a de très nombreuses personnalités dévouées et fidèles. Ils ont tous été mis dans le même sac. Quiconque dit aujourd'hui qu'il travaille à la Curie se présente comme quelqu'un qui est schizophrène, affligé d'Alzeihmer, sans foi et avide d'argent.

SPIEGEL: Certains d'entre eux ne pourraient-ils pas offrir leur démission?
Mosebach: Encore une fois le Pape sert des émotions et des préjugés. Mais il ne devraitt pas dénigrer le côté institutionnel de l'Eglise, plutôt expliquer pour quoi il est là. D'ailleurs, quand on déclare la guerre à la corruption, il serait juste de dire que la corruption, dans ce milieu et cette instance est un péché mortel, qui exclut de la communion.

SPIEGEL: François se concentre-t-il trop sur le charisme plutôt que sur un clair leadership?
Mosebach: Le charisme n'a absolument aucun rôle dans l'Office du pape. Le premier pape était Pierre, l'homme qui a renié le Seigneur. Le charismatique était Paul. Le meilleur pape est celui qui se retire derrière l'Office. Quelqu'un qui ploie sous cet Office comme sous une lourde charge. Les vêtements que les Papes portaient habituellement en sont une image. Les papes avaient l'habitude de disparaître littéralement sous leurs insignes. Et on aurait pu ne pas les voir du tout parce qu'ils étaient seulement un substitut au Christ.

SPIEGEL: Et pas les prédicateurs populaires que demandent les médias?
Mosebach: Ce qui me manque avec François, c'est la volonté de ployer sous la charge. Ce serait de l'humilité et de la modestie et après, que le Pape dorme dans un palais ou un hôtel est insignifiant.

SPIEGEL: Il donne aux gens le sentiment qu'il est l'un d'entre eux. En quoi cela est-il un problème?
Mosebach: Des Papes simples, détendus, sans prétention ont été une caractéristique régulière dans l'histoire de l'Eglise. Jean XXIII, par exemple a donné de lui-même un profil décidément simple. Et parfois même naïf. Mais il n'a pas fait lui-même comme s'il était le premier pape à comprendre correctement l'Église.

SPIEGEL: François prend également des positions inconfortables qui s'opposent à l'esprit du temps.
Mosebach: C'est vrai, mais cela ne dit rien sur le style de son leadership. C'est lui que le public, en particulier en Occident, acclame, pas l'Église.

SPIEGEL: François peut-il relancer l'Eglise dans ce pays où il suscite l'enthousiasme des fidèles (???) aux dépens d'une Eglise qui est considéreé comme sclérosée?
Mosebach: Nous sommes les témoins d'une expérience audacieuse. Il est important de se rappeler qu'elle ne dépend pas en dernière instance du pape actuel. Je dis cela en tant que catholique pour qui le pape est une autorité que je prends vraiment au sérieux. A la fin, elle dépend de la continuité. Tout ce qui profite à la continuité est bon pour l'Eglise. Tout ce qui la rompt n'est pas bon pour l'Eglise.

SPIEGEL: M. Mosebach, je vous remercie pour cette interview.

http://benoit-et-moi.fr/2015-I/actualite/une-interview-de-martin-mosebach.html

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Avec François, C`est L`atmosphère D`une Église entièrement Nouvelle - Entrevue avec Martin Mosebach Empty Re: Avec François, C`est L`atmosphère D`une Église entièrement Nouvelle - Entrevue avec Martin Mosebach

Message  Admin Mer 3 Juin 2015 - 13:46

@ Ginou Saliba :

Meeerci ! , Ginou, de nous partager cette interview très importante !

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Avec François, C`est L`atmosphère D`une Église entièrement Nouvelle - Entrevue avec Martin Mosebach Empty Re: Avec François, C`est L`atmosphère D`une Église entièrement Nouvelle - Entrevue avec Martin Mosebach

Message  Admin Mer 3 Juin 2015 - 13:48

@ Tous :

Encore un autre observateur qui trouve les comportements du Pape François ambiguës !

Et après on viendra nous dire que ce Pape est voulu de Dieu ?

La question ?

Bullshit !

Tu me fais ch... !

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