Pour comprendre François La nécessité d'un nouveau cadre narratif
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Pour comprendre François La nécessité d'un nouveau cadre narratif
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Pour comprendre François
La nécessité d'un nouveau cadre narratif
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Image : de gauche à droite, le Cardinal Jorge Mario Bergoglio, le général Jorge Valdera, dictateur de l'Argentine de 1976 à 1981)
Écrit par Hilary White
ex-correspondante à Rome
Le 11 avril 2017
SOURCE : One Peter Five
« Jorge Mario Bergoglio ... a été un fervent partisan des intérêts impériaux Américains en Amérique latine depuis plus de 30 ans ».
« ... l'un des principaux partisans ... de la dictature militaire Argentine qui est venue au pouvoir dans un coup soutenu par la CIA en 1976 ».
« Jorge Mario Bergoglio a non seulement soutenu la dictature parrainée par les États-Unis, il a également joué un rôle direct et complice dans la « sale guerre » (la guerra sucia) en liaison avec la junte militaire dirigée par le général Jorge Videla, menant à l'arrestation, à l'emprisonnement, à la torture et à la disparition de prêtres et de laïcs Catholiques progressistes qui s'opposaient à la domination militaire de l'Argentine ».
Les déclarations ci-dessus ont été faites dans un article en ligne de Michel Chossudovsky, chercheur russe-canadien, immédiatement après que le Pape François ait été élu. Il convient de noter que Chossudovsky est connu comme un colporteur de théories de la conspiration, mais il n’est pas le seul à pointer du doigt l'ancien Archevêque Cardinal de Buenos Aires en tant que personnage complice de la « sale guerre » en Argentine. Le journaliste d'enquête Argentin de gauche Horatio Verbitsky a fait des allégations similaires. En 2005, Verbitsky a publié un livre intitulé « Le silence : de Paul VI à Bergoglio : les relations secrètes entre l'Église et l'ESMA ». (La Escuela de Mecánica de la Armada (école de mécanique de la Marine ou ESMA) --- l'académie navale dont l'installation a été utilisée pour la torture par la junte Argentine pendant la guerre). Le livre de Verbitsky a mené à un procès contre Jorge Bergoglio, alléguant qu'il était impliqué dans les enlèvements de deux prêtres Jésuites dans les années 1970. Après avoir refusé deux fois de témoigner, Bergoglio a pris la barre en 2010. Commencez à interroger des Catholiques bien connectés à Buenos Aires et vous entendez un refrain constant : tout le monde a entendu dire qu'il était impliqué, personne n'a pu le prouver, il a toujours tout nié.
Bien que nous ne connaîtrons probablement jamais les vraies réponses, la vérité de la question devrait être d'un extrême intérêt pour tout journaliste sérieux qui cherche à comprendre l'homme qui règne maintenant comme l'un des Papes les plus controversés de l'histoire. Mais pour l'instant, je veux me concentrer sur la question la plus fondamentale que soulèvent ces allégations : pourquoi n’en savons-nous pas plus déjà à propos de qui est Jorge Mario Bergoglio ?
Et pour comprendre la réponse à cela, vous devez connaître un peu plus la façon dont ces informations sont découvertes et partagées.
Est-ce que vous vous demandez pourquoi personne n'a jamais entendu parler de ces accusations plutôt graves dans la presse traditionnelle dominante ? Est-ce parce qu'ils avaient déjà, le même jour que l'article de Chossudovsky a été publié — 14 mars 2013 — lancé leur amour très public avec le « humble » nouveau Pape Argentin ? Ça semble peu probable. Les citations ci-dessus ont été publiées le matin après que Bergoglio se soit présenté — une figure presque totalement inconnue — sur la loggia et n'a presque rien dit à la foule.
Cette nuit-là, la presse a joué du clavier sur Google pour trouver son nom et dénicher quelque chose à dire qui pouvait continuer leur propre histoire sécurisée et bien établie. Dans leur esprit à l'époque, la notion était encore bien établie que la figure du Pape équivalait aux vues « oppressives » du Catholicisme. C'était le rare journaliste de Rome ce soir-là [ voir la lettre du journaliste Argentin au soir de l'élection de Bergoglio --- les journalistes de Rome n'en ont pas tenu compte ] qui recevait et portait attention aux messages d'avertissement venant des compatriotes du nouveau Pape. En quelques jours, cependant, les médias laïcs et Catholiques ont trouvé des choses dans ce Pape qu'ils pouvaient aimer et les messages de mise en garde ont été noyés.
J'ai récemment demandé pourquoi les journalistes étaient tellement désireux d'éviter de se pencher sur les questions les plus intéressantes portant sur le passé du Pape, insinuant que c'était pure paresse ou manipulation idéologique. Ce manque d'intérêt semble tout à fait étrange, car François vient d'un pays dont l'histoire récente a eu tellement un intérêt politique dramatique. Quand j'étais enfant, l'Argentine était synonyme de « désordre en Amérique du Sud » — des régimes militaires de pacotille grossièrement corrompus et meurtriers saisissant brutalement le pouvoir en pointant les deux extrémités de leurs fusils sur leur propre peuple et en amassant des richesses personnelles sans le moindre respect pour vie humaine. J'avais dix ans quand le coup militaire est arrivé, et même à cet âge, j'ai compris qu'il y avait quelque chose d'horrifique.
Rappelez-vous, c'était une révolution Sud-Américaine qui dépassait tout le reste pour sa brutalité extrême. C'était l'endroit où des adversaires politiques ont « disparu » en les poussant hors des avions dans les eaux infestées de requins — après quoi, des témoins survivants ont témoigné de voir des morceaux de restes humains flottant au milieu de la mousse de mer rosacée.
Le passé est un prologue non pertinent
Immédiatement après cette nuit froide et humide à Rome, lorsque l'Église lui a été confiée comme 266e Pape, je me souviens de quelques brefs commentaires ici et là sur les « questions » relatives à l'implication de Bergoglio dans la sale guerre. Mais puisque personne ne savait vraiment de quoi il s'agissait, ça n’a pas eu de traction. De plus, ces questions ont séché presque instantanément, ne durant pas plus que quelques jours après le Conclave, jusqu'à ce que les médias séculiers aient décidé de changer de piste. Seulement quelques semaines plus tard, Bergoglio a lui-même commencé le jeu en distrayant les médias avec son « Qui suis-je pour juger ? » en conférence de presse aérienne et plusieurs d'entre nous ont jappé ensuite pour avoir des miettes de pain à sa suite depuis ce temps. Une chose que l'homme sait faire magnifiquement, nous l'avons appris, c’est de hameçonner la presse. Et la presse était trop disposée à jouer le jeu. Ils ont soudainement compris qu'ils avaient trouvé un ami, un compagnon de voyage qui proposait le même redémarrage culturel en continuité rétroactive [ anglais : same cultural ret-conned reboot ]
Mais encore…
Les parties du corps ... les requins ... une fois que vous l'avez entendu, ce genre de chose vous colle à votre tête.
Étant donné que Jorge Bergoglio, SJ, était le Supérieur Provincial des Jésuites d'Argentine, il était également une figure majeure dans l'Église juste au milieu pile de toute la fiesta désordonnée, brutale et sanglante. Ce qui, pourrait-on penser, devrait rendre le manque d'intérêt rapidement diminué de son passé un peu plus inexplicable.
Sauf ... pas vraiment.
Si l'horreur et la brutalité sont les mesures par lesquelles nous nous souvenons de l'histoire, l'Argentine devrait être sur le même plan que les Champs de la Mort et les Goulags. Mais pour une raison quelconque, les horreurs Latino-Américaines ne comptent pas et je pense que la raison en est la nature du journalisme moderne. Personne ne connaît aujourd'hui le présent et encore moins le passé que les écrivains sur Internet sont prêts à leur dire. Les horreurs de l'Holocauste de la Seconde Guerre mondiale sont utiles à un récit [ ou « narratif » ] ; les horreurs des Goulags moins ; et la sale guerre pas du tout.
Le fait est que la plupart des lecteurs à l'heure actuelle sont âgés de 20 et 30 ans et pour cette démographie hautement solipsiste [ égoïste --- centrée sur elle-même ], tout ce qui s'est passé avant leur naissance, dans un pays où ils ne sont jamais allés, n'est pas pertinent. Nous vivons dans un moment où les adolescents guerriers de la justice sociale qui crient des obscénités sur Twitter sont considérés comme des analystes politiques sobres et informés. Une femme de cinquante ans, comme moi, dont le souvenir des affaires politiques du monde remonte avant que le Retour du Jedi nous parvienne au cinéma pourrait aussi bien être un dinosaure. Et il serait utile de rappeler que la plupart des journalistes qui travaillent au Vatican sont plus jeunes que moi.
Pour comprendre comment un récit [ ou narratif ] est développé autour du Pape François, nous devons donc comprendre comment fonctionne le journalisme.
Je voudrais proposer trois raisons pour lesquelles le passé plutôt coloré de François n'a pas été mis en évidence ni dans la presse populaire laïque ou Catholique :
Contraintes de temps et d'espace
Pauvre éducation politique et philosophique
Et surtout, la transformation du rôle des médias d'information en un générateur de récits [narratifs] politiques divisés selon des catégories de factions rigoureusement définies, presque sacro-saintes et totalement inutiles.
Étant donné que les journalistes sont maintenant dans l'industrie génératrice de la réalité, ils doivent décider ce qui est et ce qui n'est pas réel. Et pour le récit choisi, rien d'autre hors ces catégories ne peut être reconnu.
Temps et espace dans le Vortex Internet
En fait, je défendrai mes collègues des deux côtés de notre fracture idéologique et disons que cet échec n'est pas vraiment complètement de leur faute. On leur présente une tâche presque impossible, la nécessité de rendre les questions politiques et sociales complexes assez simples pour qu'un simple non-expert puisse lire et digérer pas plus longtemps que 20 minutes avec son café du matin.
En fait non. Permettez-moi de modifier cela. 20 minutes étaient du temps du journalisme imprimé. Maintenant, l'écrivain a environ 150 mots pour attirer l'attention de quelqu'un sur son flux Twitter. (Pour vous donner une idée de la longueur, ce paragraphe et celui d’avant contient 154 mots.) Buzzfeed est peut-être le site qui a saisi avec succès que la plupart du « journalisme » est maintenant lu sur les téléphones dans le métro. Le « cycle quotidien des nouvelles » a été ramené de 36 à pas plus d'environ 6 heures (en gros selon les différences de fuseau horaire).
En bout de ligne, un écrivain de nouvelles n'a plus que quelques heures pour produire une copie et cette copie a une durée de conservation d'environ six heures. J'avais l'habitude de dire à mes contacts qu'ils avaient trois heures pour renvoyer mes courriels en demandant des commentaires ou autrement je devais passer à la prochaine personne sur ma liste. Et l'une des raisons pour lesquelles j'ai finalement quitté la routine quotidienne et que je suis partie indépendante, c’est que j'avais réalisé que je perdais le contact avec les problèmes que je couvrais sous la pression absolue de produire des copies à tous les jours. Je n'avais pas le temps de lire ou de digérer, ni même de comprendre ce qui se passait.
Franchement, on n'entre pas dans le journalisme en ces temps-ci en raison d'un besoin d'informer le public. Une fois que vous avez fait cela quelques années, vous vous êtes rendus compte que « le public » ne peut pas vraiment être informé. Et si vous essayez, vous allez devenir fous de désespoir. Si vous continuez dans le travail, il est très probable que c’est en raison de votre propre désir personnel de savoir ce qui se passe.
Mauvaise éducation
Il y a une raison pour laquelle le journalisme a atteint son état actuel.
Les écoles de journalisme à notre époque sont principalement des camps d'endoctrinement idéologiques de gauche. La critique de l'éducation universitaire qui a soudainement éclaté sur les écrans publics depuis l'élection de Trump a été infiniment multipliée par les facultés de journalisme depuis au moins 60 ans.
À partir de 1998, j'ai relancé mes études collégiales au département du Classique de l'Université Dalhousie. Officiellement, j'étudiais le latin. Non officiellement, c'était Boèce et Augustin. À l'époque, j'ai commencé à écrire pour le journal du campus qui consistait principalement à participer aux événements du campus et à produire de modestes articles à cinq paragraphes. C'était mon petit passe-temps.
Mais j'ai commencé à penser que je voudrais écrire pour vivre. Je lisais Edmund Burke et je m'intéressais à l'enquête de Hannah Arendt sur le mal humain et politique. (J'ai également assisté à quelques conférences publiques au département de la philosophie et j'ai appris à quel point personne ne pouvait penser correctement à l'université. Sérieusement ? ... Derrida ? ...)
J'ai visité l'école de journalisme à Kings, mon collège à Dalhousie et tout ce que j'ai vu sur le babillard étudiant était suffisant pour m'éteindre. J'ai découvert après avoir examiné le syllabus que ces enfants n'apprenaient rien de substance. Ils étaient entraînés dans un bulle auto-référentielle et totalement hermétique afin d’être utilisés comme activistes politiques —essentiellement des pions — par leurs plus anciens professeurs plus profondément idéologiquement ancrés.
Une journaliste active que j'ai contactée a déclaré que, selon son expérience, un billet à l’école de journalisme n'était rien d'autre qu'un badge de mérite idéologique et les éditeurs, même alors, les évitaient. Non seulement ils étaient tous des petits marxistes vicieux, incapables de bien jouer avec les autres, mais on ne leur enseignait même pas les rudiments de la composition. En d'autres termes, ils ne pouvaient pas écrire.
S'attendre à ce que les personnes qui n'ont jamais lu que des brochures idéologiques, qui ne peuvent pas construire des phrases simples en anglais, pour qu’ils aient une vision du monde suffisamment large pour s'attaquer aux complexités du grand enchevêtrement Sud-Américain, c’est honnêtement trop demander.
Le « biais » et le cadre narratif : le grand angle mort
Parce qu'il est leur devoir de raconter des histoires, les journalistes doivent commencer par rechercher une structure cohérente, un cadre compréhensible dans lequel le sujet qu'ils couvrent peut être compris. C'est là que nous entrons dans le monde du « biais éditorial ». Mais même un novice sur le terrain se rendra compte rapidement que chaque sortie de nouvelles est biaisée. La difficulté vient quand ils essaient de prétendre être « objectifs » et impartiaux. Quand ils essaient de cacher ce qu'ils pensent réellement dans le but de tromper le public. Le biais caché — i.e. le biais qui prétend ne pas être partial — est un vice. Mais sans un « cadre narratif », le journalisme ne pourrait pas exister.
Dans le cas des journalistes travaillant pour des maisons établies, que ce soit la BBC [ British Broadcast Corporation ] ou le National Catholic Register, cela signifie qu'ils doivent travailler dans le cadre déjà créé par leurs prédécesseurs et leurs éditeurs. Quelque chose que le public ne sait généralement pas — parce que les journaux n'aiment pas en parler — c’est que ces « préjugés » ou ces structures narratives sont même parfois inscrites dans la charte d'organisation d’un établissement. Il est écrit dans la charte fondatrice du Toronto Star, par exemple, que le journal a été créé spécifiquement afin de promouvoir un point de vue politique de gauche.
Mais reconnu ou non, un cadre narratif est une nécessité absolue et il appartient à l'auteur individuel d'essayer de discerner honnêtement la vérité de celui dans lequel il travaille. Ce travail se fait habituellement au début de sa carrière.
Dans certains cas (voir Malcolm Muggeridge), un individu découvrira qu'il a travaillé pour le « mauvais côté » et qu'il se commute, parfois de façon spectaculaire. Mais ces cas sont extrêmement rares et peuvent être assimilés à une sorte de conversion religieuse idéologique. (Et si nous nous demandons où se trouvent la plupart des emplois de journalisme payant, il faut se rappeler que Malcolm Muggeridge, l'une des voix les plus respectées de son temps, a eu tout un moment difficile à trouver un boulot payant après qu’il eut changé d’endroit.)
Le simple fait est que, même s'ils n'écrivent pas pour l'AP [ Associated Press ] ou la BBC, mais pour un public de niche comme First Things ou The Federalist ou le Spectator, ils doivent nécessairement écrire quelque chose que leur public peut comprendre — et qui est prêt à accepter.
Et la politique Sud-Américaine est difficile. C'est complexe. Cela défie nos métaphores politiques dérivées de Star Wars. Le caractère national plus nuancé des Argentins, des Paraguayens, des Chiliens et des Brésiliens est quelque chose dont la plupart d'entre nous ont peu ou pas d'expérience. Tout est enchevêtré avec des aristocrates coloniaux espagnols du 16ème siècle, le marxisme, la CIA, les drogues, les luttes de pouvoir vicieux, les coups de police militaires, les civils disparus et l'Église Catholique — dont aucun diplômé WASP [ White Anglo Saxon Protestant ] d’un école de journalisme n'aura quelque notion que ce soit.
Nous rechignons quand nous ne pouvons pas imaginer où les acteurs clés s'inscrivent dans nos catégories. Lorsque nous entendons dire que le Cardinal Jorge Bergoglio, dont on nous dit, est un « libéral », avec le soutien de la CIA de l’époque de Jimmy Carter, a aidé le régime militaire « de droite » à faire disparaître les prêtres « Progressistes », notre câblage se mêle et nos oreilles sont un peu enfumées. C'est pourquoi tant d'entre eux ont osé s'attaquer au sens de son « Péronisme ». Cela ne fait que défier nos tentatives de l'intégrer dans notre paradigme, alors on se tourne vers des sujets plus faciles.
Notre paradigme politique dichotomique gauche / droite nord-américain a été dépassé même dans la politique séculaire depuis des décennies. Cela est peut-être particulièrement vrai pour les Catholiques dont la formation politique était dans l'ère Reagan / Bush des Guerres Culturelles Américaines. Notre vision du monde se compose de deux camps politiques mutuellement opposés, proprement divisés par la « clôture politique ». On peut vivre très près de la clôture, peut-être, avoir des vues « modérées » sur l'immigration, la guerre, la pauvreté et l'environnement ( à gauche) et la contraception, l'avortement et le « mariage gay » (à droite), mais la clôture est encore l'image centrale de notre paradigme politique maintenant désespérément dépassé.
L'ère de la Guerre Culturelle tente de coller ce paradigme sur la lutte interne dans l'Église Catholique depuis que l'avènement de la Révolution sociale / sexuelle est devenue encore plus désespérée. Ce prélat ou cet autre sont encore régulièrement définis dans la presse laïque comme un « libéral » ou un « conservateur », ignorant complètement la compréhension la plus superficielle de l'enseignement social Catholique actuel.
Les écrivains sur les sujets Catholiques dénonceront souvent l'utilisation de ces étiquettes (et les prélats seront encore plus offensés par leurs catégories désignées, mais pour des raisons différentes) comme inutiles. Mais ils diront que, puisque leur auditoire, Catholique et laïc, est essentiellement le plus innocent et si peu connaissant des rudiments de l'enseignement Catholique, les étiquettes sont avec quoi nous sommes bloqués.
Le problème dans les deux domaines est que ça crée un état de cécité presque totale pour tout ce qui ne correspond pas aux catégories prédéterminées. Il faut chausser tout le monde dans un camp ou dans l'autre. C'est comme dire que, dans le règne animal, il n'y a que deux catégories, cnidaires et ongulés ; si l'on n'est ni une méduse ni un quadrupède à manger de l'herbe, on ne peut vraiment pas exister. Ou au moins, n'ayant que deux catégories possibles, que les loups, les fourmis, les corbeaux, les poissons, les phoques et les ours polaires doivent, d'une manière encore non divulguée, être classés comme une forme de méduse ou de vache.
Une nouvelle voie en avant
Cette pauvreté de catégories parmi les journalistes plutôt éduqués, travaillant avec leurs échéances quotidiennes serrées, était le problème que nous avions lorsque Jorge Mario Bergoglio a été élu le Pape en 2013.
Les médias se sont immédiatement penchés et ont commencé à le positionner par rapport à leur clôture définissant leur paradigme. Et bien sûr, certaines des premières choses que nous avons entendues à propos de lui, cette nuit-là, étaient qu'il était « conservateur » parce qu'il s'était opposé au « mariage homosexuel » et qu'il était « très fort » contre l'avortement en Argentine.
Presto ! Il colle au paradigme à temps pour un apéritif ! À neuf heures, tout le monde a fait un clic sur la touche « envoyer » et est sorti au dîner dans le Borgo pour célébrer un récit bien entretenu. Que rien de ce récit ne soit démontré comme vrai après cinq minutes d’avoir utilisé Google à cette fin n'a pas dissuadé du tout ces conservateurs journalistes.
Environ trois jours plus tard, sans sourciller de l’œil, ils avaient lu ses signaux et ont rétroagi en le considérant comme un héros de leur cause, et nous nous trouvons ici aujourd'hui, avec cette balle de démolition Péroniste jouant de la presse comme les imbéciles qu'ils sont. Comme du poisson lancé dans un bassin plein de phoques entraînés. Mais dans tout cela, la confusion a grandi et grandi. Les journalistes perdent leur public alors qu'ils continuent à répéter bêtement leur récit tandis que le Pape continue de défier toutes les catégories. La seule chose dans l'esprit de Bergoglio — sa passion toute dévorante — est la seule chose qu'ils ont manqué : sa convoitise résolu et sans scrupule pour le pouvoir.
Pour comprendre cela, nous avons besoin d'un nouveau cadre narratif. Je suggère que, parce que nous ne sommes pas limités par les contraintes des délais quotidiens et des grands budgets d'exploitation, le travail de clarification du cadre narratif pourrait être entrepris par des blogueurs et d'autres types de chercheurs indépendants, en gagnant notre vie comme nous le faisons par des ventes directes aux consommateurs.
Mais surtout, le public doit commencer à utiliser ses propres facultés rationnelles. Si un journaliste parle de « l'humble Pape François », le lecteur doit commencer à se demander si cette caractérisation correspond aux faits. Si le site Tablet nous dit que le Cardinal Burke ou Matthew Festing (l'ancien Grand Maître des Chevaliers de Malte) sont des menteurs et des tricheurs, il faut regarder quel genre de publication est Tablet et ce que nous connaissons des caractères et des intentions de tels hommes.
Lorsque The Indépendant ou Tablet ou le Gardian ou le Washington Post nous dit que Jorge Mario Bergoglio a été exonéré de tout soupçon d'acte répréhensible dans son implication dans les atrocités de la junte militaire de l'Argentine des années 1970, il faut se demander quel genre d'écrivains ils sont et comment ils ont couvert d'autres questions liées à l'Église. Et nous ferions bien de comparer leurs couvertures avec ce que nous connaissons du comportement actuel de Bergoglio et de nous demander qu’est-ce qui est plausible et probable.
Nous ne pouvons pas connaître la vérité en acceptant aveuglément un cadre narratif donné. Mais il faut aussi nous rappeler qu'aucun journaliste ne peut dire la vérité sans un tel cadre.
Pour comprendre François
La nécessité d'un nouveau cadre narratif
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Image : de gauche à droite, le Cardinal Jorge Mario Bergoglio, le général Jorge Valdera, dictateur de l'Argentine de 1976 à 1981)
Écrit par Hilary White
ex-correspondante à Rome
Le 11 avril 2017
SOURCE : One Peter Five
« Jorge Mario Bergoglio ... a été un fervent partisan des intérêts impériaux Américains en Amérique latine depuis plus de 30 ans ».
« ... l'un des principaux partisans ... de la dictature militaire Argentine qui est venue au pouvoir dans un coup soutenu par la CIA en 1976 ».
« Jorge Mario Bergoglio a non seulement soutenu la dictature parrainée par les États-Unis, il a également joué un rôle direct et complice dans la « sale guerre » (la guerra sucia) en liaison avec la junte militaire dirigée par le général Jorge Videla, menant à l'arrestation, à l'emprisonnement, à la torture et à la disparition de prêtres et de laïcs Catholiques progressistes qui s'opposaient à la domination militaire de l'Argentine ».
Les déclarations ci-dessus ont été faites dans un article en ligne de Michel Chossudovsky, chercheur russe-canadien, immédiatement après que le Pape François ait été élu. Il convient de noter que Chossudovsky est connu comme un colporteur de théories de la conspiration, mais il n’est pas le seul à pointer du doigt l'ancien Archevêque Cardinal de Buenos Aires en tant que personnage complice de la « sale guerre » en Argentine. Le journaliste d'enquête Argentin de gauche Horatio Verbitsky a fait des allégations similaires. En 2005, Verbitsky a publié un livre intitulé « Le silence : de Paul VI à Bergoglio : les relations secrètes entre l'Église et l'ESMA ». (La Escuela de Mecánica de la Armada (école de mécanique de la Marine ou ESMA) --- l'académie navale dont l'installation a été utilisée pour la torture par la junte Argentine pendant la guerre). Le livre de Verbitsky a mené à un procès contre Jorge Bergoglio, alléguant qu'il était impliqué dans les enlèvements de deux prêtres Jésuites dans les années 1970. Après avoir refusé deux fois de témoigner, Bergoglio a pris la barre en 2010. Commencez à interroger des Catholiques bien connectés à Buenos Aires et vous entendez un refrain constant : tout le monde a entendu dire qu'il était impliqué, personne n'a pu le prouver, il a toujours tout nié.
Bien que nous ne connaîtrons probablement jamais les vraies réponses, la vérité de la question devrait être d'un extrême intérêt pour tout journaliste sérieux qui cherche à comprendre l'homme qui règne maintenant comme l'un des Papes les plus controversés de l'histoire. Mais pour l'instant, je veux me concentrer sur la question la plus fondamentale que soulèvent ces allégations : pourquoi n’en savons-nous pas plus déjà à propos de qui est Jorge Mario Bergoglio ?
Et pour comprendre la réponse à cela, vous devez connaître un peu plus la façon dont ces informations sont découvertes et partagées.
Est-ce que vous vous demandez pourquoi personne n'a jamais entendu parler de ces accusations plutôt graves dans la presse traditionnelle dominante ? Est-ce parce qu'ils avaient déjà, le même jour que l'article de Chossudovsky a été publié — 14 mars 2013 — lancé leur amour très public avec le « humble » nouveau Pape Argentin ? Ça semble peu probable. Les citations ci-dessus ont été publiées le matin après que Bergoglio se soit présenté — une figure presque totalement inconnue — sur la loggia et n'a presque rien dit à la foule.
Cette nuit-là, la presse a joué du clavier sur Google pour trouver son nom et dénicher quelque chose à dire qui pouvait continuer leur propre histoire sécurisée et bien établie. Dans leur esprit à l'époque, la notion était encore bien établie que la figure du Pape équivalait aux vues « oppressives » du Catholicisme. C'était le rare journaliste de Rome ce soir-là [ voir la lettre du journaliste Argentin au soir de l'élection de Bergoglio --- les journalistes de Rome n'en ont pas tenu compte ] qui recevait et portait attention aux messages d'avertissement venant des compatriotes du nouveau Pape. En quelques jours, cependant, les médias laïcs et Catholiques ont trouvé des choses dans ce Pape qu'ils pouvaient aimer et les messages de mise en garde ont été noyés.
J'ai récemment demandé pourquoi les journalistes étaient tellement désireux d'éviter de se pencher sur les questions les plus intéressantes portant sur le passé du Pape, insinuant que c'était pure paresse ou manipulation idéologique. Ce manque d'intérêt semble tout à fait étrange, car François vient d'un pays dont l'histoire récente a eu tellement un intérêt politique dramatique. Quand j'étais enfant, l'Argentine était synonyme de « désordre en Amérique du Sud » — des régimes militaires de pacotille grossièrement corrompus et meurtriers saisissant brutalement le pouvoir en pointant les deux extrémités de leurs fusils sur leur propre peuple et en amassant des richesses personnelles sans le moindre respect pour vie humaine. J'avais dix ans quand le coup militaire est arrivé, et même à cet âge, j'ai compris qu'il y avait quelque chose d'horrifique.
Rappelez-vous, c'était une révolution Sud-Américaine qui dépassait tout le reste pour sa brutalité extrême. C'était l'endroit où des adversaires politiques ont « disparu » en les poussant hors des avions dans les eaux infestées de requins — après quoi, des témoins survivants ont témoigné de voir des morceaux de restes humains flottant au milieu de la mousse de mer rosacée.
Le passé est un prologue non pertinent
Immédiatement après cette nuit froide et humide à Rome, lorsque l'Église lui a été confiée comme 266e Pape, je me souviens de quelques brefs commentaires ici et là sur les « questions » relatives à l'implication de Bergoglio dans la sale guerre. Mais puisque personne ne savait vraiment de quoi il s'agissait, ça n’a pas eu de traction. De plus, ces questions ont séché presque instantanément, ne durant pas plus que quelques jours après le Conclave, jusqu'à ce que les médias séculiers aient décidé de changer de piste. Seulement quelques semaines plus tard, Bergoglio a lui-même commencé le jeu en distrayant les médias avec son « Qui suis-je pour juger ? » en conférence de presse aérienne et plusieurs d'entre nous ont jappé ensuite pour avoir des miettes de pain à sa suite depuis ce temps. Une chose que l'homme sait faire magnifiquement, nous l'avons appris, c’est de hameçonner la presse. Et la presse était trop disposée à jouer le jeu. Ils ont soudainement compris qu'ils avaient trouvé un ami, un compagnon de voyage qui proposait le même redémarrage culturel en continuité rétroactive [ anglais : same cultural ret-conned reboot ]
Mais encore…
Les parties du corps ... les requins ... une fois que vous l'avez entendu, ce genre de chose vous colle à votre tête.
Étant donné que Jorge Bergoglio, SJ, était le Supérieur Provincial des Jésuites d'Argentine, il était également une figure majeure dans l'Église juste au milieu pile de toute la fiesta désordonnée, brutale et sanglante. Ce qui, pourrait-on penser, devrait rendre le manque d'intérêt rapidement diminué de son passé un peu plus inexplicable.
Sauf ... pas vraiment.
Si l'horreur et la brutalité sont les mesures par lesquelles nous nous souvenons de l'histoire, l'Argentine devrait être sur le même plan que les Champs de la Mort et les Goulags. Mais pour une raison quelconque, les horreurs Latino-Américaines ne comptent pas et je pense que la raison en est la nature du journalisme moderne. Personne ne connaît aujourd'hui le présent et encore moins le passé que les écrivains sur Internet sont prêts à leur dire. Les horreurs de l'Holocauste de la Seconde Guerre mondiale sont utiles à un récit [ ou « narratif » ] ; les horreurs des Goulags moins ; et la sale guerre pas du tout.
Le fait est que la plupart des lecteurs à l'heure actuelle sont âgés de 20 et 30 ans et pour cette démographie hautement solipsiste [ égoïste --- centrée sur elle-même ], tout ce qui s'est passé avant leur naissance, dans un pays où ils ne sont jamais allés, n'est pas pertinent. Nous vivons dans un moment où les adolescents guerriers de la justice sociale qui crient des obscénités sur Twitter sont considérés comme des analystes politiques sobres et informés. Une femme de cinquante ans, comme moi, dont le souvenir des affaires politiques du monde remonte avant que le Retour du Jedi nous parvienne au cinéma pourrait aussi bien être un dinosaure. Et il serait utile de rappeler que la plupart des journalistes qui travaillent au Vatican sont plus jeunes que moi.
Pour comprendre comment un récit [ ou narratif ] est développé autour du Pape François, nous devons donc comprendre comment fonctionne le journalisme.
Je voudrais proposer trois raisons pour lesquelles le passé plutôt coloré de François n'a pas été mis en évidence ni dans la presse populaire laïque ou Catholique :
Contraintes de temps et d'espace
Pauvre éducation politique et philosophique
Et surtout, la transformation du rôle des médias d'information en un générateur de récits [narratifs] politiques divisés selon des catégories de factions rigoureusement définies, presque sacro-saintes et totalement inutiles.
Étant donné que les journalistes sont maintenant dans l'industrie génératrice de la réalité, ils doivent décider ce qui est et ce qui n'est pas réel. Et pour le récit choisi, rien d'autre hors ces catégories ne peut être reconnu.
Temps et espace dans le Vortex Internet
En fait, je défendrai mes collègues des deux côtés de notre fracture idéologique et disons que cet échec n'est pas vraiment complètement de leur faute. On leur présente une tâche presque impossible, la nécessité de rendre les questions politiques et sociales complexes assez simples pour qu'un simple non-expert puisse lire et digérer pas plus longtemps que 20 minutes avec son café du matin.
En fait non. Permettez-moi de modifier cela. 20 minutes étaient du temps du journalisme imprimé. Maintenant, l'écrivain a environ 150 mots pour attirer l'attention de quelqu'un sur son flux Twitter. (Pour vous donner une idée de la longueur, ce paragraphe et celui d’avant contient 154 mots.) Buzzfeed est peut-être le site qui a saisi avec succès que la plupart du « journalisme » est maintenant lu sur les téléphones dans le métro. Le « cycle quotidien des nouvelles » a été ramené de 36 à pas plus d'environ 6 heures (en gros selon les différences de fuseau horaire).
En bout de ligne, un écrivain de nouvelles n'a plus que quelques heures pour produire une copie et cette copie a une durée de conservation d'environ six heures. J'avais l'habitude de dire à mes contacts qu'ils avaient trois heures pour renvoyer mes courriels en demandant des commentaires ou autrement je devais passer à la prochaine personne sur ma liste. Et l'une des raisons pour lesquelles j'ai finalement quitté la routine quotidienne et que je suis partie indépendante, c’est que j'avais réalisé que je perdais le contact avec les problèmes que je couvrais sous la pression absolue de produire des copies à tous les jours. Je n'avais pas le temps de lire ou de digérer, ni même de comprendre ce qui se passait.
Franchement, on n'entre pas dans le journalisme en ces temps-ci en raison d'un besoin d'informer le public. Une fois que vous avez fait cela quelques années, vous vous êtes rendus compte que « le public » ne peut pas vraiment être informé. Et si vous essayez, vous allez devenir fous de désespoir. Si vous continuez dans le travail, il est très probable que c’est en raison de votre propre désir personnel de savoir ce qui se passe.
Mauvaise éducation
Il y a une raison pour laquelle le journalisme a atteint son état actuel.
Les écoles de journalisme à notre époque sont principalement des camps d'endoctrinement idéologiques de gauche. La critique de l'éducation universitaire qui a soudainement éclaté sur les écrans publics depuis l'élection de Trump a été infiniment multipliée par les facultés de journalisme depuis au moins 60 ans.
À partir de 1998, j'ai relancé mes études collégiales au département du Classique de l'Université Dalhousie. Officiellement, j'étudiais le latin. Non officiellement, c'était Boèce et Augustin. À l'époque, j'ai commencé à écrire pour le journal du campus qui consistait principalement à participer aux événements du campus et à produire de modestes articles à cinq paragraphes. C'était mon petit passe-temps.
Mais j'ai commencé à penser que je voudrais écrire pour vivre. Je lisais Edmund Burke et je m'intéressais à l'enquête de Hannah Arendt sur le mal humain et politique. (J'ai également assisté à quelques conférences publiques au département de la philosophie et j'ai appris à quel point personne ne pouvait penser correctement à l'université. Sérieusement ? ... Derrida ? ...)
J'ai visité l'école de journalisme à Kings, mon collège à Dalhousie et tout ce que j'ai vu sur le babillard étudiant était suffisant pour m'éteindre. J'ai découvert après avoir examiné le syllabus que ces enfants n'apprenaient rien de substance. Ils étaient entraînés dans un bulle auto-référentielle et totalement hermétique afin d’être utilisés comme activistes politiques —essentiellement des pions — par leurs plus anciens professeurs plus profondément idéologiquement ancrés.
Une journaliste active que j'ai contactée a déclaré que, selon son expérience, un billet à l’école de journalisme n'était rien d'autre qu'un badge de mérite idéologique et les éditeurs, même alors, les évitaient. Non seulement ils étaient tous des petits marxistes vicieux, incapables de bien jouer avec les autres, mais on ne leur enseignait même pas les rudiments de la composition. En d'autres termes, ils ne pouvaient pas écrire.
S'attendre à ce que les personnes qui n'ont jamais lu que des brochures idéologiques, qui ne peuvent pas construire des phrases simples en anglais, pour qu’ils aient une vision du monde suffisamment large pour s'attaquer aux complexités du grand enchevêtrement Sud-Américain, c’est honnêtement trop demander.
Le « biais » et le cadre narratif : le grand angle mort
Parce qu'il est leur devoir de raconter des histoires, les journalistes doivent commencer par rechercher une structure cohérente, un cadre compréhensible dans lequel le sujet qu'ils couvrent peut être compris. C'est là que nous entrons dans le monde du « biais éditorial ». Mais même un novice sur le terrain se rendra compte rapidement que chaque sortie de nouvelles est biaisée. La difficulté vient quand ils essaient de prétendre être « objectifs » et impartiaux. Quand ils essaient de cacher ce qu'ils pensent réellement dans le but de tromper le public. Le biais caché — i.e. le biais qui prétend ne pas être partial — est un vice. Mais sans un « cadre narratif », le journalisme ne pourrait pas exister.
Dans le cas des journalistes travaillant pour des maisons établies, que ce soit la BBC [ British Broadcast Corporation ] ou le National Catholic Register, cela signifie qu'ils doivent travailler dans le cadre déjà créé par leurs prédécesseurs et leurs éditeurs. Quelque chose que le public ne sait généralement pas — parce que les journaux n'aiment pas en parler — c’est que ces « préjugés » ou ces structures narratives sont même parfois inscrites dans la charte d'organisation d’un établissement. Il est écrit dans la charte fondatrice du Toronto Star, par exemple, que le journal a été créé spécifiquement afin de promouvoir un point de vue politique de gauche.
Mais reconnu ou non, un cadre narratif est une nécessité absolue et il appartient à l'auteur individuel d'essayer de discerner honnêtement la vérité de celui dans lequel il travaille. Ce travail se fait habituellement au début de sa carrière.
Dans certains cas (voir Malcolm Muggeridge), un individu découvrira qu'il a travaillé pour le « mauvais côté » et qu'il se commute, parfois de façon spectaculaire. Mais ces cas sont extrêmement rares et peuvent être assimilés à une sorte de conversion religieuse idéologique. (Et si nous nous demandons où se trouvent la plupart des emplois de journalisme payant, il faut se rappeler que Malcolm Muggeridge, l'une des voix les plus respectées de son temps, a eu tout un moment difficile à trouver un boulot payant après qu’il eut changé d’endroit.)
Le simple fait est que, même s'ils n'écrivent pas pour l'AP [ Associated Press ] ou la BBC, mais pour un public de niche comme First Things ou The Federalist ou le Spectator, ils doivent nécessairement écrire quelque chose que leur public peut comprendre — et qui est prêt à accepter.
Et la politique Sud-Américaine est difficile. C'est complexe. Cela défie nos métaphores politiques dérivées de Star Wars. Le caractère national plus nuancé des Argentins, des Paraguayens, des Chiliens et des Brésiliens est quelque chose dont la plupart d'entre nous ont peu ou pas d'expérience. Tout est enchevêtré avec des aristocrates coloniaux espagnols du 16ème siècle, le marxisme, la CIA, les drogues, les luttes de pouvoir vicieux, les coups de police militaires, les civils disparus et l'Église Catholique — dont aucun diplômé WASP [ White Anglo Saxon Protestant ] d’un école de journalisme n'aura quelque notion que ce soit.
Nous rechignons quand nous ne pouvons pas imaginer où les acteurs clés s'inscrivent dans nos catégories. Lorsque nous entendons dire que le Cardinal Jorge Bergoglio, dont on nous dit, est un « libéral », avec le soutien de la CIA de l’époque de Jimmy Carter, a aidé le régime militaire « de droite » à faire disparaître les prêtres « Progressistes », notre câblage se mêle et nos oreilles sont un peu enfumées. C'est pourquoi tant d'entre eux ont osé s'attaquer au sens de son « Péronisme ». Cela ne fait que défier nos tentatives de l'intégrer dans notre paradigme, alors on se tourne vers des sujets plus faciles.
Notre paradigme politique dichotomique gauche / droite nord-américain a été dépassé même dans la politique séculaire depuis des décennies. Cela est peut-être particulièrement vrai pour les Catholiques dont la formation politique était dans l'ère Reagan / Bush des Guerres Culturelles Américaines. Notre vision du monde se compose de deux camps politiques mutuellement opposés, proprement divisés par la « clôture politique ». On peut vivre très près de la clôture, peut-être, avoir des vues « modérées » sur l'immigration, la guerre, la pauvreté et l'environnement ( à gauche) et la contraception, l'avortement et le « mariage gay » (à droite), mais la clôture est encore l'image centrale de notre paradigme politique maintenant désespérément dépassé.
L'ère de la Guerre Culturelle tente de coller ce paradigme sur la lutte interne dans l'Église Catholique depuis que l'avènement de la Révolution sociale / sexuelle est devenue encore plus désespérée. Ce prélat ou cet autre sont encore régulièrement définis dans la presse laïque comme un « libéral » ou un « conservateur », ignorant complètement la compréhension la plus superficielle de l'enseignement social Catholique actuel.
Les écrivains sur les sujets Catholiques dénonceront souvent l'utilisation de ces étiquettes (et les prélats seront encore plus offensés par leurs catégories désignées, mais pour des raisons différentes) comme inutiles. Mais ils diront que, puisque leur auditoire, Catholique et laïc, est essentiellement le plus innocent et si peu connaissant des rudiments de l'enseignement Catholique, les étiquettes sont avec quoi nous sommes bloqués.
Le problème dans les deux domaines est que ça crée un état de cécité presque totale pour tout ce qui ne correspond pas aux catégories prédéterminées. Il faut chausser tout le monde dans un camp ou dans l'autre. C'est comme dire que, dans le règne animal, il n'y a que deux catégories, cnidaires et ongulés ; si l'on n'est ni une méduse ni un quadrupède à manger de l'herbe, on ne peut vraiment pas exister. Ou au moins, n'ayant que deux catégories possibles, que les loups, les fourmis, les corbeaux, les poissons, les phoques et les ours polaires doivent, d'une manière encore non divulguée, être classés comme une forme de méduse ou de vache.
Une nouvelle voie en avant
Cette pauvreté de catégories parmi les journalistes plutôt éduqués, travaillant avec leurs échéances quotidiennes serrées, était le problème que nous avions lorsque Jorge Mario Bergoglio a été élu le Pape en 2013.
Les médias se sont immédiatement penchés et ont commencé à le positionner par rapport à leur clôture définissant leur paradigme. Et bien sûr, certaines des premières choses que nous avons entendues à propos de lui, cette nuit-là, étaient qu'il était « conservateur » parce qu'il s'était opposé au « mariage homosexuel » et qu'il était « très fort » contre l'avortement en Argentine.
Presto ! Il colle au paradigme à temps pour un apéritif ! À neuf heures, tout le monde a fait un clic sur la touche « envoyer » et est sorti au dîner dans le Borgo pour célébrer un récit bien entretenu. Que rien de ce récit ne soit démontré comme vrai après cinq minutes d’avoir utilisé Google à cette fin n'a pas dissuadé du tout ces conservateurs journalistes.
Environ trois jours plus tard, sans sourciller de l’œil, ils avaient lu ses signaux et ont rétroagi en le considérant comme un héros de leur cause, et nous nous trouvons ici aujourd'hui, avec cette balle de démolition Péroniste jouant de la presse comme les imbéciles qu'ils sont. Comme du poisson lancé dans un bassin plein de phoques entraînés. Mais dans tout cela, la confusion a grandi et grandi. Les journalistes perdent leur public alors qu'ils continuent à répéter bêtement leur récit tandis que le Pape continue de défier toutes les catégories. La seule chose dans l'esprit de Bergoglio — sa passion toute dévorante — est la seule chose qu'ils ont manqué : sa convoitise résolu et sans scrupule pour le pouvoir.
Pour comprendre cela, nous avons besoin d'un nouveau cadre narratif. Je suggère que, parce que nous ne sommes pas limités par les contraintes des délais quotidiens et des grands budgets d'exploitation, le travail de clarification du cadre narratif pourrait être entrepris par des blogueurs et d'autres types de chercheurs indépendants, en gagnant notre vie comme nous le faisons par des ventes directes aux consommateurs.
Mais surtout, le public doit commencer à utiliser ses propres facultés rationnelles. Si un journaliste parle de « l'humble Pape François », le lecteur doit commencer à se demander si cette caractérisation correspond aux faits. Si le site Tablet nous dit que le Cardinal Burke ou Matthew Festing (l'ancien Grand Maître des Chevaliers de Malte) sont des menteurs et des tricheurs, il faut regarder quel genre de publication est Tablet et ce que nous connaissons des caractères et des intentions de tels hommes.
Lorsque The Indépendant ou Tablet ou le Gardian ou le Washington Post nous dit que Jorge Mario Bergoglio a été exonéré de tout soupçon d'acte répréhensible dans son implication dans les atrocités de la junte militaire de l'Argentine des années 1970, il faut se demander quel genre d'écrivains ils sont et comment ils ont couvert d'autres questions liées à l'Église. Et nous ferions bien de comparer leurs couvertures avec ce que nous connaissons du comportement actuel de Bergoglio et de nous demander qu’est-ce qui est plausible et probable.
Nous ne pouvons pas connaître la vérité en acceptant aveuglément un cadre narratif donné. Mais il faut aussi nous rappeler qu'aucun journaliste ne peut dire la vérité sans un tel cadre.
AnneLéa- C'est la Béatitude Éternelle du Ciel !
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Date d'inscription : 03/07/2014
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