Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales
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Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales
CHAPITRE XIV
DE LA PAUVRETÉ D'ESPRIT OBSERVÉE ENTRE LES RICHESSES
Hélas! Philothée, jamais nul ne confessera d'être avare; chacun désavoue cette bassesse et vileté de coeur. On s'excuse sur la charge des enfants qui presse, sur la sagesse qui requiert qu'on s'établisse en moyens : jamais on n'en a trop, il se trouve toujours certaines nécessités d'en avoir davantage; et même les plus avares, non seulement ne confessent pas de l'être, mais ils ne pensent pas en leur conscience de l'être ; non, car l'avarice est une fièvre prodigieuse, qui se rend d'autant plus insensible qu'elle est plus violente et ardente.
Moïse vit le feu sacré qui brûlait un buisson et ne le consumait nullement, mais au contraire le feu profane de l'avarice consume et dévore l'avaricieux et ne le brûle aucunement; au moins, emmi ses ardeurs et chaleurs plus excessives, il se vante de la plus douce fraîcheur du monde, et tient que son altération insatiable est une soif toute naturelle et suave.
Si vous désirez longuement, ardemment et avec inquiétude les biens que vous n'avez pas, vous avez beau dire que vous ne les voulez pas avoir injustement, car pour cela vous ne lasserez pas d'être vraiment avare.
Celui qui désire ardemment, longuement et avec inquiétude de boire, quoiqu'il ne veuille pas boire que de l'eau, si témoigne-t-il d'avoir la fièvre.
O Philothée! je ne sais si c'est un désir juste de désirer d'avoir justement, ce qu'un autre possède justement: car il semble que par ce désir nous nous voulons accommoder par l'incommodité dautrui.
Celui qui possède un bien justement, n'a-t-il plus de raison de le garder justement, que nous de le vouloir avoir justement ? et pourquoi donc étendons-nous notre désir sur sa commodité pour l'en priver?
Tout au plus si ce désir est juste, certes, il n'est pas pourtant charitable ; car nous ne voudrions nullement qu'au cun désirât, quoique justement, ce que nous voulons garder justement.
Ce fut le péché dAchab qui voulut avoir justement la vigne de Naboth, qui la voulait encore plus justement garder : il la désira ardemment, longuement et avec inquiétude, et partant il offensa Dieu.
Attendez, chère Philothée, de désirer le bien du prochain quand il commencera à désirer de s'en défaire ; car lors son désir rendra le vôtre non seulement juste, mais charitable oui, car je veux bien que vous ayez soin d'accroître vos moyens et facultés, pourvu que ce soit non seulement justement, mais doucement et charitablement.
Si vous affectionnez fort les biens que vous avez, si vous en êtes fort embesognée, mettant votre coeur en iceux, y attachant vos pensées et craignant d'une crainte vive et empressée de les perdre, croyez-moi, vous avez encore quelque sorte de fièvre; car les fébricitants boivent l'eau qu'on leur donne avec un certain empressement, avec une sorte d'attention et d'aise que ceux qui sont sains n'ont point accoutumé d'avoir :
il n'est pas possible de se plaire beaucoup en une chose, que l'on n'y mette beaucoup d'affection.
S'il vous arrive de perdre des biens, et vous sentez que votre coeur s'en désole et afflige beaucoup, croyez, Philothée, que vous y avez beaucoup d'affection; car rien ne témoigne tant d'affection à la chose perdue que l'affliction de la perte.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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CHAPITRE XIV
DE LA PAUVRETÉ D'ESPRIT OBSERVÉE ENTRE LES RICHESSES
Ne désirez donc point d'un désir entier et formé le bien que vous n'avez pas; ne mettez point fort avant votre coeur en celui que vous avez; ne vous désolez point des pertes qui vous arriveront, et vous aurez quelque sujet de croire qu'étant riche en effet vous ne l'êtes point d'affection, mais que vous êtes pauvre d'esprit et par conséquent bienheureuse, « car le Royaume des cieux vous appartient ».
CHAPITRE XV
COMME IL FAUT PRATIQUER LA PAUVRETÉ RÉELLE
DEMEURANT NÉANMOINS RÉELLEMENT RICHE
Le peintre Parrhasius peignit le peuple Athénien par une invention fort ingénieuse, le représentant d'un naturel divers et variable :
colère, injuste, inconstant, courtois, clément, Miséricordieux, hautain, glorieux, humble, bravache et fuyard, et tout cela ensemble; mais moi, chère Philothée, je voudrais mettre en votre coeur la richesse et la pauvreté tout ensemble, un grand soin et un grand mépris des choses temporelles.
Ayez beaucoup plus de soin de rendre vos biens utiles et fructueux que les mondains n'en ont pas. Dites-moi, les jardiniers des grands princes ne sont-ils pas plus curieux et diligents à cultiver et embellir les jardins qu'ils ont en charge, que s'ils leur appartenaient en propriété.?
Mais pourquoi cela ? parce, sans doute, qu'ils considèrent ces jardins-là comme jardins des princes et des rois, auxquels ils désirent de se rendre agréables par ces services-là. Ma Philothée, les possessions que nous avons ne sont pas nôtres :
Dieu les nous a données à cultiver et veut que nous les rendions fructueuses et utiles, et partant nous lui faisons service agréable d'en avoir soin.
Mais il faut donc que ce soit un soin plus grand et solide que celui que les mondains ont de leurs biens, car ils ne s'embesognent que pour l'amour deux-mêmes, et nous devons travailler pour l'amour de Dieu: or, comme l'amour de soi-même est un amour violent, turbulent, empressé, aussi le soin qu'on a pour lui est plein de trouble, de chagrin, d'inquiétude ; et comme l'amour de Dieu est doux, paisible et tranquille, aussi le soin qui en procède, quoique ce soit pour les biens du monde, est amiable, doux et gracieux.
Ayons donc ce soin gracieux de la conservation, voire de l'accroissement de nos biens temporels, lorsque quelque juste occasion s'en présentera et en tant que notre condition le requiert, car Dieu veut que nous fassions ainsi pour son amour.
Mais prenez garde que l'amour-propre ne vous trompe, car quelquefois il contrefait si bien l'amour de Dieu qu'on dirait que c'est lui: or, pour empêcher qu'il ne vous déçoive, et que ce soin des biens temporels ne se convertisse en avarice, outre ce que j'ai dit au chapitre précédent, il nous faut pratiquer bien souvent la pauvreté réelle et effectuelle, emmi toutes les facultés et richesses que Dieu nous a données.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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CHAPITRE XV
COMME IL FAUT PRATIQUER LA PAUVRETÉ RÉELLE
DEMEURANT NÉANMOINS RÉELLEMENT RICHE
Quittez donc toujours quelque partie de vos moyens en les donnant aux pauvres de bon coeur; car donner ce qu'on a, c'est sappauvrir d'autant, et plus vous donnerez plus vous vous appauvrirez.
Il est vrai que Dieu vous le rendra, non seulement en l'autre monde, mais en cetui-ci, car il n'y a rien qui fasse tant prospérer temporellement que l'aumône; mais en attendant que Dieu vous le rende, vous serez toujours appauvrie de cela. Oh! le saint et riche appauvrissement que celui qui se fait par laumône!
Aimez les pauvres et la pauvreté, car par cet amour vous deviendrez vraiment pauvre, puisque, comme dit l'Ecriture, nous sommes faits comme les choses que nous aimons.
L'amour égale les amants: « Qui est infirme, avec lequel je ne sois infirme ? » dit saint Paul. Il pouvait dire : « Qui est pauvre, avec lequel je ne sois pauvre ? » parce que l'amour le faisait être tel que ceux qu'il aimait.
Si donc vous aimez les pauvres, vous serez vraiment participante de leur pauvreté, et pauvre comme eux.
Or, si vous aimez les pauvres, mettez-vous souvent parmi eux: prenez plaisir à les voir chez vous et à les visiter chez eux; conversez volontiers avec eux; soyez bien aise qu'il vous approchent aux églises, aux rues et ailleurs.
Soyez pauvre de langue avec eux, leur parlant comme leur compagne; mais soyez riche des mains, leur départant de vos biens, comme plus abondante.
Voulez-vous faire encore davantage, ma Philothée ? ne vous contentez pas d'être pauvre comme les pauvres, mais soyez plus pauvre que les pauvres. Et comment cela ? « Le serviteur est moindre que son maître »:
rendez-vous donc servante des pauvres; allez les servir dans leurs lits quand ils sont malades, je dis de vos propres mains; soyez leur cuisinière, et à vos propres dépens; soyez leur lingère et blanchisseuse. O ma Philothée, ce service est plus triomphant qu'une royauté.
Je ne puis assez admirer l'ardeur avec laquelle cet avis fut pratiqué par saint Louis, l'un des grands rois que le soleil ait vus, mais je dis grand roi en toute sorte de grandeur.
Il servait fort souvent à la table des pauvres qu'il nourrissait, et en faisait car ils ne sembesognent que pour l'amour deux-mêmes, et nous devons travailler pour l'amour de Dieu:
or, comme l'amour de soi-même est un amour violent, turbulent, empressé, aussi le soin qu'on a pour lui est plein de trouble, de chagrin, d'inquiétude ; et comme l'amour de Dieu est doux, paisible et tranquille, aussi le soin qui en procède, quoique ce soit pour les biens du monde, est amiable, doux et gracieux.
Ayons donc ce soin gracieux de la conservation, voire de l'accroissement de nos biens temporels, lorsque quelque juste occasion s'en présentera et en tant que notre condition le requiert, car Dieu veut que nous fassions ainsi pour son amour.
Source : Livres-mystiques.com
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CHAPITRE XV
COMME IL FAUT PRATIQUER LA PAUVRETÉ RÉELLE
DEMEURANT NÉANMOINS RÉELLEMENT RICHE
Mais prenez garde que l'amour-propre ne vous trompe, car quelquefois il contrefait si bien l'amour de Dieu qu'on dirait que c'est lui: or, pour empêcher quil ne vous déçoive, et que ce soin des biens temporels ne se convertisse en avarice, outre ce que j ai dit au chapitre précédent, il nous faut pratiquer bien souvent la pauvreté réelle et effectuelle, emmi toutes les facultés et richesses que Dieu nous a données.
Quittez donc toujours quelque partie de vos moyens en les donnant aux pauvres de bon coeur; car donner ce qu'on a, c'est s'appauvrir d'autant, et plus vous donnerez plus vous vous appauvrirez. Il est vrai que Dieu vous le rendra, non seulement en l'autre monde, mais en cetui-ci, car il n'y a rien qui fasse tant prospérer temporellement que l'aumône; mais en attendant que Dieu vous le rende, vous serez toujours appauvrie de cela. Oh! le saint et riche appauvrissement que celui qui se fait par l'aumône!
Aimez les pauvres et la pauvreté, car par cet amour vous deviendrez vraiment pauvre, puisque, comme dit l'Ecriture, nous sommes faits comme les choses que nous aimons. L'amour égale les amants: « Qui est infirme, avec lequel je ne sois infirme? »dit saint Paul.
Il pouvait dire : « Qui est pauvre, avec lequel je ne sois pauvre ? » parce que l'amour le faisait être tel que ceux qu'il aimait. Si donc vous aimez les pauvres, vous serez vraiment participante de leur pauvreté, et pauvre comme eux. Or, si vous aimez les pauvres, mettez-vous souvent parmi eux: prenez plaisir à les voir chez vous et à les visiter chez eux ; conversez volontiers avec eux; soyez bien aise qu'il vous approchent aux églises, aux rues et ailleurs. Soyez pauvre de langue avec eux, leur parlant comme leur compagne; mais soyez riche des mains, leur départant de vos biens, comme plus abondante.
Voulez-vous faire encore davantage, ma Philothée ? ne vous contentez pas d'être pauvre comme les pauvres, mais soyez plus pauvre que les pauvres. Et comment cela ? « Le serviteur est moindre que son maître »: rendez-vous donc servante des pauvres; allez les servir dans leurs lits quand ils sont malades, je dis de vos propres mains; soyez leur cuisinière, et à vos propres dépens; soyez leur lingère et blanchisseuse. O ma Philothée, ce service est plus triomphant qu'une royauté.
Je ne puis assez admirer l'ardeur avec laquelle cet avis fut pratiqué par saint Louis, l'un des grands rois que le soleil ait vus, mais je dis grand roi en toute sorte de grandeur. Il servait fort souvent à la table des pauvres qu'il nourrissait, et en faisait venir presque tous les jours trois à la sienne; et souvent il mangeait les restes de leur potage avec un amour non pareil.
Quand il visitait les hôpitaux des malades (ce quil faisait fort souvent), il se mettait ordinairement à servir ceux qui avaient les maux les plus horribles, comme ladres, chancreux et autres semblables, et leur faisait tout son service à tête nue et les genoux à terre, respectant en leur personne le Sauveur du monde, et les chérissant d'un amour aussi tendre qu'une douce mère eût su faire son enfant. Sainte Elisabeth, fille du roi de Hongrie, se mêlait ordinairement avec les pauvres, et pour se récréer s'habillait quelquefois en pauvre femme parmi ses dames, leur disant : « Si j'étais pauvre, je m'habillerais ainsi. » O
mon Dieu, chère Philothée, que ce prince et cette princesse étaient pauvres en leurs richesses, et qu'ils étaient riches en leur pauvreté!
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Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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CHAPITRE XV
COMME IL FAUT PRATIQUER LA PAUVRETÉ RÉELLE
DEMEURANT NÉANMOINS RÉELLEMENT RICHE
« Bienheureux sont ceux qui sont ainsi pauvres, car à eux appartient le Royaume des cieux. » « J'ai eu faim, vous m'avez repu ; j'ai eu froid, vous m'avez revêtu: possédez le royaume qui vous a été préparé dès la constitution du monde », dira le Roi dès pauvres et des rois en son grand jugement.
Il n'est celui qui en quelque occasion nait quelque manquement et défaut de commodités. Il arrive quelquefois chez nous un hôte que nous voudrions et devrions bien traiter; il n'y a pas moyen pour lheure; on a ses beaux habits en un lieu, on en aurait besoin en un autre où il serait requis de paraître; il arrive que tous les vins de la cave se poussent et tournent :
il n'en reste plus que les mauvais et verts; on se trouve aux champs dans quelque bicoque, où tout manque: on n'a lit, ni chambre, ni table, ni service. Enfin, il est facile d'avoir souvent besoin de quelque chose, pour riche qu'on soit; or cela, c'est être pauvre en effet de ce qui nous manque. Philothée, soyez bien aise de ces rencontres, acceptez-les de bon coeur, souffrez-les gaîment.
Quand il vous arrivera des inconvénients qui vous appauvriront ou de beaucoup ou de peu, comme font les tempêtes, les feux, les inondations, les stérilités, les larcins, les procès, oh ! c'est alors la vraie saison de pratiquer la pauvreté, recevant avec douceurs ces diminutions de facultés, et s'accommodant patiemment et constamment à cet appauvrissement.
Esaü se présenta à son père avec ses mains toutes couvertes de poil, et Jacob en fit de même; mais parce que le poil qui était ès mains de Jacob ne tenait pas à sa peau, ains à ses gants, on lui pouvait ôter son poil sans l'offenser ni écorcher au contraire, parce que le poil des mains d'Esaü tenait à sa peau, qu'il avait toute velue de son naturel, qui lui eût voulu arracher son poil lui eût bien donné de la douleur: il eût bien crié; il se fût bien échauffé à la défense.
Quand nos moyens nous tiennent au coeur, si la tempête, si le larron, si le chicaneur nous en arrache quelque partie, quelles plaintes, quels troubles, quelles impatiences en avons-nous ! mais quand nos biens ne tiennent qu'au soin que Dieu veut que nous en ayons, et non pas à notre coeur, si on nous les arrache, nous n'en perdrons pourtant pas le sens ni la tranquillité.
C'est la différence des bêtes et des hommes quant à leurs robes : car les robes des bêtes tiennent à leur chair, et celles des hommes y sont seulement appliquées, en sorte qu'ils puissent les mettre et ôter quand ils veulent.
CHAPITRE XVI
POUR PRATIQUER LA RICHESSE D'ESPRIT EMMI LA PAUVRETÉ RÉELLE
Mais si vous êtes réellement pauvre, très chère Philothée, o Dieu, soyez-le encore d'esprit; faites de nécessité vertu, et employez cette pierre précieuse de la pauvreté pour ce qu'elle vaut: son éclat n'est pas découvert en ce monde, mais si est~ce pourtant qu'il est extrêmement beau et riche.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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CHAPITRE XVI
POUR PRATIQUER LA RICHESSE D'ESPRIT EMMI LA PAUVRETÉ RÉELLE
Mais si vous êtes réellement pauvre, très chère Philothée, o Dieu, soyez-le encore d'esprit; faites de nécessité vertu, et employez cette pierre précieuse de la pauvreté pour ce qu'elle vaut: son éclat n'est pas découvert en ce monde, mais si est~ce pourtant qu'il est extrêmement beau et riche.
Ayez patience, vous êtes en bonne compagnie: Notre Seigneur, Notre Dame, les Apôtres, tant de saints et de saintes ont été pauvres, et pouvant être riches ils ont méprisé de l'être.
Combien y a-t-il de grands mondains qui, avec beaucoup de contradictions, sont allés rechercher avec un soin non pareil la sainte pauvreté dedans les cloîtres et les hôpitaux? Ils ont pris beaucoup de peine pour la trouver, témoins saint Alexis, sainte Paule, saint Paulin, sainte Angèle et tant d'autres; et voilà, Philothée, que, plus gracieuse en votre endroit, elle se vient présenter chez vous; vous l'avez rencontrée sans la chercher et sans peine: embrassez-la donc comme la chère amie de Jésus-Christ, qui naquit, vécut et mourut avec la pauvreté, qui fut sa nourrice toute sa vie.
Votre pauvreté, Philothée, a deux grands privilèges, par le moyen desquels elle vous peut beaucoup faire mériter. Le premier est qu'elle ne vous est point arrivée par votre choix, mais par la seule volonté de Dieu, qui vous a faite pauvre sans qu'il y ait eu aucune concurrence de votre volonté propre.
Or, ce que nous recevons purement de la volonté de Dieu lui est toujours très agréable, pourvu que nous le recevions de bon coeur et pour l'amour de sa sainte volonté: où il y a moins du nôtre, il y a plus de Dieu. La simple et pure acceptation de la volonté de Dieu rend une souffrance extrêmement pure.
Le second privilège de cette pauvreté, c'est qu'elle est une pauvreté vraiment pauvre. Une pauvreté louée, caressée, estimée, secourue et assistée, elle tient de la richesse, elle n'est pour le moins pas du tout pauvre; mais une pauvreté méprisée, rejetée, reprochée et abandonnée, elle est vraiment pauvre.
Or, telle est pour lordinaire la pauvreté des séculiers; car parce qu'ils ne sont pas pauvres par leur élection, mais par nécessité, on n'en tient pas grand compte; et en ce qu'on nen tient pas grand compte, leur pauvreté est plus pauvre que celle des religieux, bien que celle-ci d'ailleurs ait une excellence fort grande et trop plus recommandable, à raison du voeu et de l'intention pour laquelle elle a été choisie.
Ne vous plaignez donc pas, ma chère Philothée, de votre pauvreté ; car on ne se plaint que de ce qui déplaît, et si la pauvreté vous déplaît vous n'êtes plus pauvre d'esprit, ains riche d'affection.
Ne vous désolez point de n'être pas si bien secourue qu'il serait requis; car en cela consiste l'excellence de la pauvreté. Vouloir être pauvre et n'en recevoir point d'incommodité, c'est une grande ambition ; car c'est vouloir l'honneur de la pauvreté et la commodité des richesses.
N'ayez point de honte d'être pauvre ni de demander l'aumône en charité ; recevez celle qui vous sera donnée, avec humilité, et acceptez le refus avec douceur.
Ressouvenez-vous souvent du voyage que Notre Dame fit en Egypte pour y porter son cher enfant, et combien de mépris, de pauvreté, de misère il lui convint supporter. Si vous vivez comme cela, vous serez très riche en votre pauvreté.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
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CHAPITRE XVII
DE L'AMITIÉ, ET PREMIÈREMENT DE LA MAUVAISE ET FRIVOLE
L'amour tient le premier rang entre les passions de l'âme : c'est le roi de tous les mouvements du coeur, il convertit tout le reste à soi et nous rend tels que ce qu'il aime. Prenez donc bien garde, ma Philothée, de n'en point avoir de mauvais, car tout aussitôt vous seriez toute mauvaise. Or l'amitié est le plus dangereux amour de tous, parce que les autres amours peuvent être sans communication, mais l'amitié étant totalement fondée sur icelle, on ne peut presque l'avoir avec une personne sans participer à ses qualités.
Tout amour n'est pas amitié; car, 1. On peut aimer sans être aimé, et lors il y a de l'amour, mais non pas de l'amitié, d'autant que l'amitié est un amour mutuel, et s'il n'est pas mutuel ce n'est pas amitié. 2. Et ne suffit pas qu'il soit mutuel, mais il faut que les parties qui s'entraiment sachent leur réciproque affection, car si elles l'ignorent elles auront de l'amour, mais non pas de l'amitié. 3. Il faut avec cela qu'il y ait entre elles quelque sorte de communication qui soit le fondement de l'amitié.
Selon la diversité des communications l'amitié est aussi diverse, et les communications sont différentes selon la différence des biens quon s'entrecommunique : si ce sont des biens faux et vains, l'amitié est fausse et vaine, si ce sont de vrais biens, l'amitié est vraie; et plus excellents seront les biens, plus excellente sera l'amitié. Car, comme le miel est plus excellent quand il se cueille ès fleurons des fleurs plus exquises, ainsi l'amour fondé sur une plus exquise communication est le plus excellent; et comme il y a du miel en Héraclée du Pont, qui est vénéneux et fait devenir insensés ceux qui le mangent, parce qu'il est recueilli sur l'aconit qui est abondant en cette région-là, ainsi l'amitié fondée sur la communication des faux et vicieux biens est toute fausse et mauvaise.
La communion des voluptés charnelles est une mutuelle propension et amorce brutale, laquelle ne peut non plus porter le nom d'amitié entre les hommes, que celles des ânes et chevaux pour semblables effets ; et s'il n'y avait nulle autre communication au mariage, ii n'y aurait non plus nulle amitié; mais, parce qu'outre celle-là il y a en icelui la communication de la vie, de l'industrie, des biens, des affections et d'une indissoluble fidélité, c'est pourquoi l'amitié du mariage est une vraie amitié et sainte.
L'amitié fondée sur la communication des plaisirs sensuels est toute grossière, et indigne du nom d'amitié, comme aussi celle qui est fondée sur des vertus frivoles et vaines, parce que ces vertus dépendent aussi des sens. J'appelle plaisirs sensuels ceux qui s'attachent immédiatement et principalement aux sens extérieurs, comme le plaisir de voir la beauté, d'ouïr une douce voix, de toucher et semblables. J'appelle vertus frivoles certaines habilités et qualités vaines que les faibles d'esprits appellent vertus et perfections.
Oyez parler la plupart des filles, des femmes et des jeunes gens, ils ne se feindront nullement de dire : un tel gentilhomme est fort vertueux, il a beaucoup de perfections, car il danse bien, il joue bien à toutes sortes de jeux, il s'habille bien, il chante bien, il cajole bien, il a bonne mine; et les charlatans tiennent pour les plus vertueux d'entre eux ceux qui sont les plus grands bouffons.
Or, comme tout cela regarde les sens, aussi les amitiés qui en proviennent s'appellent sensuelles, vaines et frivoles, et méritent plutôt le nom de folâtrerie que d'amitié. Ce sont ordinairement les amitiés des jeunes gens, qui se tiennent aux moustaches, aux cheveux, aux oeillades, aux habits, à la morgue, à la babillerie: amitiés dignes de l'âge des amants, qui n'ont encore aucune vertu qu'en bourre ni nul jugement qu'en bouton; aussi telles amitiés ne sont que passagères et fondent comme la neige au soleil.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales
CHAPITRE XVIII
DES AMOURETTES
Quand ces amitiés folâtres se pratiquent entre gens de divers sexe, et sans prétention du mariage, elles s'appellent amourettes, car n'étant que certains avortons, ou plutôt fantômes d'amitié, elles ne peuvent porter le nom ni d'amitié, ni d'amour, pour leur incomparable vanité et imperfection.
Or, par icelles, les coeurs des hommes et des femmes demeurent pris et engagés et entrelacés les uns avec les autres en vaines et folles affections, fondées sur ces frivoles communications et chétifs agréments desquels je viens de parler.
Et bien que ces sottes amours vont ordinairement fondre et s'abîmer en des charnalités et lascivités fort vilaines, si est-ce que ce n'est pas le premier dessein de ceux qui les exercent; autrement ce ne seraient plus amourettes, ains impudicités manifestes.
Il se passera même quelquefois plusieurs années sans qu'il arrive, entre ceux qui sont atteints de cette folie, aucune chose qui soit directement contraire à la chasteté du corps, iceux s'arrêtant seulement à détremper leurs coeurs en souhaits, désirs, soupirs, muguetteries et autres telles niaiseries et vanités, et ce pour diverses prétentions.
Les uns n'ont d'autre dessein que d'assouvir leurs coeurs à donner et recevoir de l'amour, suivant en cela leur inclination amoureuse, et ceux-ci ne regardent à rien pour le choix de leurs amours sinon à leur goût et instinct, si qu'à la rencontre d'un sujet agréable, sans examiner l'intérieur ni les déportements dicelui, ils commenceront cette communication d'amourettes et se fourreront dedans les misérables filets desquels par après ils auront peine de sortir.
Les autres se laissent aller à cela par vanité, leur étant avis que ce ne soit pas peu de gloire de prendre et lier les coeurs par amour; et ceux-ci, faisant leur élection pour la gloire, dressent leurs pièges et tendent leurs toiles en des lieux spéciaux, relevés, rares et illustres.
Les autres sont portés et par leur inclination amoureuse et par vanité tout ensemble, car encore qu'ils aient le coeur contourné à l'amour, si ne veulent-ils pourtant pas en prendre qu'avec quelque avantage de gloire.
Ces amitiés sont toutes mauvaises, folles et vaines: mauvaises, d'autant qu'elles aboutissent et se terminent enfin au péché de la chair, et qu'elles dérobent l'amour et par conséquent le coeur à Dieu, à la femme et au mari, à qui il était dû; folles, parce qu'elles n'ont ni fondement ni raison; vaines, parce qu'elles ne rendent aucun profit, ni honneur, ni contentement.
Au contraire elles perdent le temps, embarrassent l'honneur, sans donner aucun plaisir que celui d'un empressement de prétendre et espérer, sans savoir ce qu'on veut ni qu'on prétend.
Car il est toujours avis à ces chétifs et faibles esprits qu'il y a je ne sais quoi à désirer ès témoignages qu'on leur rend de l'amour réciproque, et ne sauraient dire que c'est; dont leur désir ne peut finir, mais va toujours pressant leur coeur de perpétuelles défiances, jalousies et inquiétudes.
Source : Livres-mystiques.com
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Dernière édition par ami de la Miséricorde le Jeu 30 Nov 2023 - 17:32, édité 1 fois
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