La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange
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Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange
CHAPITRE III
DIEU, ÊTRE ET VÉRITÉ SUPRÊMES
Ce que Platon dit de la beauté, il faut le dire de la vérité
Et alors où est le fondement de ces vérités éternelles et nécessaires, qui dominent toute réalité finie et toute intelligence finie ? Où est ce fondement, sinon dans l'Être suprême, dans la Vérité suprême, toujours connue par l'Intelligence première, qui, loin d'avoir reçu la Vérité, est la Vérité, la Vérité pure sans mélange d'erreur, sans mélange d'ignorance, sans aucune limite ou imperfection.
D'un mot : les vérités, qui, comme des lois nécessaires et éternelles, DOMINENT toute réalité périssable et toute intelligence finie, doivent avoir leur fondement dans une Vérité suprême; qui est l'Être même et la Sagesse même.
Or l'Être même, la Vérité même, la Sagesse même, c'est Dieu.
Telle est cette nouvelle preuve de son existence, proposée par Platon, par saint Augustin et par saint Thomas.
Nous voyons mieux maintenant le sens de la portée du principe sur lequel repose cette preuve « Le plus et le moins parfait se disent de différents êtres suivant qu'ils approchent plus ou moins de l'Être qui est la perfection même ».
En d'autres termes : Lorsqu'une perfection, dont le concept n'implique pas d'imperfection, comme la bonté, la vérité, la beauté, se trouve à des degrés divers dans différents êtres, aucun de ceux qui la possèdent à un degré encore imparfait ne suffit à en rendre compte; il y participe seulement et l'a reçue dans la mesure de sa capacité et il l'a reçue d'un Être supérieur, qui est cette perfection même.
Quelle conclusion pratique devons-nous tirer de cette élévation ? Celle que Notre-Seigneur exprimait en disant : « Dieu seul est bon » c'est-à-dire d'une bonté sans mélange, Dieu seul est vrai d'une vérité et d'une sagesse sans limite d'ignorance, Dieu seul est beau de cette beauté sans restriction que nous sommes appelés à contempler un jour face à face, de cette beauté que contemplait dès ici-bas l'intelligence humaine de Jésus, lorsqu'il, parlait à ses disciples.
Dieu seul est grand, comme dit saint Michel en répondant à l'orgueil de Satan. Cela nous met dans l'humilité.
Nous n'avons qu'une existence d'emprunt, que Dieu nous a librement donnée et qu'il nous conserve parce qu'il le veut bien ; - nous n'avons qu'une bonté très mélangée de faiblesse, de misère même, et une sagesse très mélangée d'erreurs. En nous mettant dans l'humilité, cela nous montre par contraste l'infinie grandeur de Dieu.
Et puis s'il s'agit non plus de nous-mêmes mais des autres; si nous avons trouvé des désillusions dans le prochain que nous avions cru meilleur et plus sage; rappelons-nous que nous aussi nous avons donné des désillusions à notre prochain, qu'il est peut-être meilleur que nous; que tout ce que nous avons à nous, par nous-mêmes, c'est-à-dire notre indigence et nos défauts, est inférieur à ce que notre prochain tient de Dieu. C'est le fondement de l'humilité à l'égard d'autrui.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
DIEU, ÊTRE ET VÉRITÉ SUPRÊMES
Ce que Platon dit de la beauté, il faut le dire de la vérité
Et alors où est le fondement de ces vérités éternelles et nécessaires, qui dominent toute réalité finie et toute intelligence finie ? Où est ce fondement, sinon dans l'Être suprême, dans la Vérité suprême, toujours connue par l'Intelligence première, qui, loin d'avoir reçu la Vérité, est la Vérité, la Vérité pure sans mélange d'erreur, sans mélange d'ignorance, sans aucune limite ou imperfection.
D'un mot : les vérités, qui, comme des lois nécessaires et éternelles, DOMINENT toute réalité périssable et toute intelligence finie, doivent avoir leur fondement dans une Vérité suprême; qui est l'Être même et la Sagesse même.
Or l'Être même, la Vérité même, la Sagesse même, c'est Dieu.
Telle est cette nouvelle preuve de son existence, proposée par Platon, par saint Augustin et par saint Thomas.
Nous voyons mieux maintenant le sens de la portée du principe sur lequel repose cette preuve « Le plus et le moins parfait se disent de différents êtres suivant qu'ils approchent plus ou moins de l'Être qui est la perfection même ».
En d'autres termes : Lorsqu'une perfection, dont le concept n'implique pas d'imperfection, comme la bonté, la vérité, la beauté, se trouve à des degrés divers dans différents êtres, aucun de ceux qui la possèdent à un degré encore imparfait ne suffit à en rendre compte; il y participe seulement et l'a reçue dans la mesure de sa capacité et il l'a reçue d'un Être supérieur, qui est cette perfection même.
Quelle conclusion pratique devons-nous tirer de cette élévation ? Celle que Notre-Seigneur exprimait en disant : « Dieu seul est bon » c'est-à-dire d'une bonté sans mélange, Dieu seul est vrai d'une vérité et d'une sagesse sans limite d'ignorance, Dieu seul est beau de cette beauté sans restriction que nous sommes appelés à contempler un jour face à face, de cette beauté que contemplait dès ici-bas l'intelligence humaine de Jésus, lorsqu'il, parlait à ses disciples.
Dieu seul est grand, comme dit saint Michel en répondant à l'orgueil de Satan. Cela nous met dans l'humilité.
Nous n'avons qu'une existence d'emprunt, que Dieu nous a librement donnée et qu'il nous conserve parce qu'il le veut bien ; - nous n'avons qu'une bonté très mélangée de faiblesse, de misère même, et une sagesse très mélangée d'erreurs. En nous mettant dans l'humilité, cela nous montre par contraste l'infinie grandeur de Dieu.
Et puis s'il s'agit non plus de nous-mêmes mais des autres; si nous avons trouvé des désillusions dans le prochain que nous avions cru meilleur et plus sage; rappelons-nous que nous aussi nous avons donné des désillusions à notre prochain, qu'il est peut-être meilleur que nous; que tout ce que nous avons à nous, par nous-mêmes, c'est-à-dire notre indigence et nos défauts, est inférieur à ce que notre prochain tient de Dieu. C'est le fondement de l'humilité à l'égard d'autrui.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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CHAPITRE III
DIEU, ÊTRE ET VÉRITÉ SUPRÊMES
Ce que Platon dit de la beauté, il faut le dire de la vérité
Enfin il faut nous dire que ces désillusions, éprouvées ou causées par nous, à la vue de l'imperfection foncière de la créature, sont permises pour nous faire aspirer plus fortement à connaître et à aimer Celui qui est la Vérité et la Vie, Celui que nous verrons un jour, comme Il se voit. Nous comprendrons alors cette parole de sainte Catherine de Sienne : « la connaissance vécue de notre misère et celle de la grandeur de Dieu grandissent ensemble. Elles sont comme le point le plus bas et le point le plus élevé d'un cercle, qui grandirait toujours ». Et chaque fois que nous voyons mieux nos imperfections, nos limites, nous voyons mieux aussi que Dieu à cause de son infinie sagesse et de son infinie bonté doit être aimé par-dessus tout.
Enfin, dernière remarque, la Vérité suprême nous a parlé elle-même, elle s'est révélée elle-même de façon encore obscure, mais c'est sur elle que repose notre foi chrétienne. C'est au nom de cette Vérité suprême que Jésus dit : « En vérité, en vérité, je vous le dis... » Il est lui-même la Vérité et la Vie, dont nous devons vivre un peu mieux chaque jour. Ceci dépasse de beaucoup Platon ; ce n'est plus une ascension abstraite, philosophique vers la Vérité suprême ; c'est la Vérité suprême qui s'incline vers nous, pour nous élever jusqu'à elle.
CHAPITRE IV
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
En parlant de Dieu, Être et Vérité suprêmes, nous avons vu que la multiplicité des êtres, qui se ressemblent par une même perfection comme la bonté, ne suffit pas à rendre compte de cette unité de similitude qui est en elle : le multiple, comme le disait Platon, ne peut rendre raison de l'un. Et de plus aucun des êtres qui possèdent cette perfection à un degré imparfait ne suffit à en rendre compte, car chacun est un composé de cette perfection et de la capacité restreinte qui la limite, et, comme tout composé, il demande une cause : « quæ secundum se diversa sunt, non conveniunt in aliquod unum, nisi per aliquam causam adunantem ipsa ». Ce composé participe à cette perfection, il y a part, et donc il l'a reçue et il n'a pu la recevoir que de Celui qui est cette Perfection même, dont la notion n'implique aucune imperfection.
Cette doctrine devient, au point de vue moral, singulièrement vivante en nous rappelant que plus nous constatons nos limites, celles de notre sagesse et de notre bonté, plus nous devons penser à Celui qui est la Sagesse même et la Bonté même. Le multiple ne s'explique que par l'un, le divers que par l'identique, le composé que par le simple, l'imparfait mêlé d'imperfection que par le Parfait, pur de toute imperfection.
Cette preuve de l'existence de Dieu en contient implicitement une autre que Saint Thomas développe ailleurs Ia-IIae, q. 2. a. 8, en montrant que la béatitude ou le vrai bonheur, que l'homme désire naturellement; ne peut se trouver dans aucun bien limité ou restreint, mais seulement en Dieu connu au moins de façon naturelle, et aimé efficacement par-dessus tout. Il démontre que la béatitude de l'homme ne peut être ni dans les richesses, ni dans les honneurs, ni dans la gloire, ni dans le pouvoir, ni dans aucun bien du corps, ni dans un bien de l'âme comme la vertu, ni dans aucun bien limité. La démonstration qu'il donne de ce dernier point tient à la nature même de notre intelligence et de notre volonté[5].
Voyons 1° quel est le fait d'où part cette preuve, 2° quel est le principe sur lequel elle repose ; 3° quel est le terme auquel elle aboutit ; 4° ce qu'elle ne saurait exiger.
Source : Livres-mystiques.com
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DIEU, ÊTRE ET VÉRITÉ SUPRÊMES
Ce que Platon dit de la beauté, il faut le dire de la vérité
Enfin il faut nous dire que ces désillusions, éprouvées ou causées par nous, à la vue de l'imperfection foncière de la créature, sont permises pour nous faire aspirer plus fortement à connaître et à aimer Celui qui est la Vérité et la Vie, Celui que nous verrons un jour, comme Il se voit. Nous comprendrons alors cette parole de sainte Catherine de Sienne : « la connaissance vécue de notre misère et celle de la grandeur de Dieu grandissent ensemble. Elles sont comme le point le plus bas et le point le plus élevé d'un cercle, qui grandirait toujours ». Et chaque fois que nous voyons mieux nos imperfections, nos limites, nous voyons mieux aussi que Dieu à cause de son infinie sagesse et de son infinie bonté doit être aimé par-dessus tout.
Enfin, dernière remarque, la Vérité suprême nous a parlé elle-même, elle s'est révélée elle-même de façon encore obscure, mais c'est sur elle que repose notre foi chrétienne. C'est au nom de cette Vérité suprême que Jésus dit : « En vérité, en vérité, je vous le dis... » Il est lui-même la Vérité et la Vie, dont nous devons vivre un peu mieux chaque jour. Ceci dépasse de beaucoup Platon ; ce n'est plus une ascension abstraite, philosophique vers la Vérité suprême ; c'est la Vérité suprême qui s'incline vers nous, pour nous élever jusqu'à elle.
CHAPITRE IV
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
En parlant de Dieu, Être et Vérité suprêmes, nous avons vu que la multiplicité des êtres, qui se ressemblent par une même perfection comme la bonté, ne suffit pas à rendre compte de cette unité de similitude qui est en elle : le multiple, comme le disait Platon, ne peut rendre raison de l'un. Et de plus aucun des êtres qui possèdent cette perfection à un degré imparfait ne suffit à en rendre compte, car chacun est un composé de cette perfection et de la capacité restreinte qui la limite, et, comme tout composé, il demande une cause : « quæ secundum se diversa sunt, non conveniunt in aliquod unum, nisi per aliquam causam adunantem ipsa ». Ce composé participe à cette perfection, il y a part, et donc il l'a reçue et il n'a pu la recevoir que de Celui qui est cette Perfection même, dont la notion n'implique aucune imperfection.
Cette doctrine devient, au point de vue moral, singulièrement vivante en nous rappelant que plus nous constatons nos limites, celles de notre sagesse et de notre bonté, plus nous devons penser à Celui qui est la Sagesse même et la Bonté même. Le multiple ne s'explique que par l'un, le divers que par l'identique, le composé que par le simple, l'imparfait mêlé d'imperfection que par le Parfait, pur de toute imperfection.
Cette preuve de l'existence de Dieu en contient implicitement une autre que Saint Thomas développe ailleurs Ia-IIae, q. 2. a. 8, en montrant que la béatitude ou le vrai bonheur, que l'homme désire naturellement; ne peut se trouver dans aucun bien limité ou restreint, mais seulement en Dieu connu au moins de façon naturelle, et aimé efficacement par-dessus tout. Il démontre que la béatitude de l'homme ne peut être ni dans les richesses, ni dans les honneurs, ni dans la gloire, ni dans le pouvoir, ni dans aucun bien du corps, ni dans un bien de l'âme comme la vertu, ni dans aucun bien limité. La démonstration qu'il donne de ce dernier point tient à la nature même de notre intelligence et de notre volonté[5].
Voyons 1° quel est le fait d'où part cette preuve, 2° quel est le principe sur lequel elle repose ; 3° quel est le terme auquel elle aboutit ; 4° ce qu'elle ne saurait exiger.
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Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
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CHAPITRE IV
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
I - Le fait d'expérience: Le vrai bonheur, solide et durable, n'est pas dans les biens qui passent
On peut s'élever au Bien suprême, source d'un bonheur parfait et sans mélange, en partant soit des biens imparfaits subordonnés, soit du désir naturel que ces biens ne parviennent pas à satisfaire.
Si l'on part des biens finis, limités, que l'homme est naturellement porté à désirer, on constate bien vite leur imperfection : qu'il s'agisse de la santé, des plaisirs du corps, des richesses, des honneurs, du pouvoir, de la gloire, de la connaissance des sciences, on est bien obligé de constater que ce sont là des biens qui passent, des biens fort imparfaits et limités.
Or, comme nous le disions, l'imparfait ou le bien mêlé d'imperfection n'est qu'un bien participé par une capacité restreinte qui le reçoit, un bien qui suppose le bien pur, sans mélange de son contraire, comme la sagesse mêlée d'ignorance et d'erreur n'est qu'une sagesse participée qui suppose la Sagesse même. C'est l'aspect métaphysique de l'argument, c'est la dialectique, de l'intelligence par voie de causalité à la fois exemplaire et efficiente.
Mais la preuve dont nous parlons devient plus vive, plus convaincante, plus prenante, si nous partons de notre désir naturel du bonheur que tous nous ressentons si vivement en nous.
C'est l'aspect psychologique et moral de l'argument ; c'est la dialectique de l'amour, fondée sur celle de l'intelligence, qui procède soit par voie de causalité efficiente (productrice ou ordonnatrice), soit par voie de causalité finale.
Ce sont les deux causes extrinsèques, aussi nécessaires l'une que l'autre, et même la fin est la première des causes. Et Aristote (Mét., l. XII, c. 7) a mieux vu la causalité finale de Dieu, Acte pur, que sa causalité efficiente, soit productrice, soit ordonnatrice.
Saint Thomas (Ia-IIae, q. 2, a. 7 et 8, à la suite d'Aristote et de saint Augustin, insiste sur ce fait, que l'homme désire naturellement être heureux, et comme son intelligence, très supérieure aux sens et à l'imagination de l'animal, connaît, non seulement tel bien particulier, délectable ou utile, tel aliment, tel remède, mais le bien en général (universale in prædicando), ce qui constitue le bien comme tel, le désirable quel qu'il soit, il s'ensuit que l'homme, tendant, non pas vers l'idée abstraite du bien, mais vers le bien réel qui est dans les choses, ne peut trouver sa vraie béatitude en aucun bien fini ou limité, mais seulement dans le Souverain Bien (bonum universale in essendo et in causando).
Il est impossible que l'homme trouve le vrai bonheur, qu'il désire naturellement, en aucun bien limité, car son intelligence constatant aussitôt LA LIMITE, conçoit un bien supérieur, et naturellement la volonté le désire.
C'est là un fait profondément noté par saint Augustin dans ses Confessions I, 1, lorsqu'il dit : Notre cœur, Seigneur, reste toujours dans l'inquiétude, l'insatisfaction, tant qu'il ne se repose pas en toi : « Irrequietum est cor nostrum, donec requiescat in te, Domine ».
Source : Livres-mystiques.com
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DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
I - Le fait d'expérience: Le vrai bonheur, solide et durable, n'est pas dans les biens qui passent
On peut s'élever au Bien suprême, source d'un bonheur parfait et sans mélange, en partant soit des biens imparfaits subordonnés, soit du désir naturel que ces biens ne parviennent pas à satisfaire.
Si l'on part des biens finis, limités, que l'homme est naturellement porté à désirer, on constate bien vite leur imperfection : qu'il s'agisse de la santé, des plaisirs du corps, des richesses, des honneurs, du pouvoir, de la gloire, de la connaissance des sciences, on est bien obligé de constater que ce sont là des biens qui passent, des biens fort imparfaits et limités.
Or, comme nous le disions, l'imparfait ou le bien mêlé d'imperfection n'est qu'un bien participé par une capacité restreinte qui le reçoit, un bien qui suppose le bien pur, sans mélange de son contraire, comme la sagesse mêlée d'ignorance et d'erreur n'est qu'une sagesse participée qui suppose la Sagesse même. C'est l'aspect métaphysique de l'argument, c'est la dialectique, de l'intelligence par voie de causalité à la fois exemplaire et efficiente.
Mais la preuve dont nous parlons devient plus vive, plus convaincante, plus prenante, si nous partons de notre désir naturel du bonheur que tous nous ressentons si vivement en nous.
C'est l'aspect psychologique et moral de l'argument ; c'est la dialectique de l'amour, fondée sur celle de l'intelligence, qui procède soit par voie de causalité efficiente (productrice ou ordonnatrice), soit par voie de causalité finale.
Ce sont les deux causes extrinsèques, aussi nécessaires l'une que l'autre, et même la fin est la première des causes. Et Aristote (Mét., l. XII, c. 7) a mieux vu la causalité finale de Dieu, Acte pur, que sa causalité efficiente, soit productrice, soit ordonnatrice.
Saint Thomas (Ia-IIae, q. 2, a. 7 et 8, à la suite d'Aristote et de saint Augustin, insiste sur ce fait, que l'homme désire naturellement être heureux, et comme son intelligence, très supérieure aux sens et à l'imagination de l'animal, connaît, non seulement tel bien particulier, délectable ou utile, tel aliment, tel remède, mais le bien en général (universale in prædicando), ce qui constitue le bien comme tel, le désirable quel qu'il soit, il s'ensuit que l'homme, tendant, non pas vers l'idée abstraite du bien, mais vers le bien réel qui est dans les choses, ne peut trouver sa vraie béatitude en aucun bien fini ou limité, mais seulement dans le Souverain Bien (bonum universale in essendo et in causando).
Il est impossible que l'homme trouve le vrai bonheur, qu'il désire naturellement, en aucun bien limité, car son intelligence constatant aussitôt LA LIMITE, conçoit un bien supérieur, et naturellement la volonté le désire.
C'est là un fait profondément noté par saint Augustin dans ses Confessions I, 1, lorsqu'il dit : Notre cœur, Seigneur, reste toujours dans l'inquiétude, l'insatisfaction, tant qu'il ne se repose pas en toi : « Irrequietum est cor nostrum, donec requiescat in te, Domine ».
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Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
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CHAPITRE IV
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
I - Le fait d'expérience: Le vrai bonheur, solide et durable, n'est pas dans les biens qui passent
Qui d'entre nous n'a constaté ce fait dans sa vie profonde ? Si nous sommes malades, nous désirons naturellement la santé, comme un grand bien, et dès que nous sommes guéris, si heureux soyons-nous de notre guérison, nous constatons que la santé ne suffit pas à notre bonheur, et qu'elle ne donne pas la paix de l'âme; on peut être en parfaite santé, et accablé de tristesse. - Il en est de même des plaisirs des sens : loin de suffire à nous donner le bonheur, pour peu qu'on en abuse, ils jettent dans le désenchantement et le dégoût, parce qu'aussitôt notre intelligence, qui conçoit le bien universel et sans limite, nous dit : cette délectation sensible, qui t'attirait tout à l'heure, tu vois, maintenant que tu l'as obtenue, qu'elle est la pauvreté même, et incapable de satisfaire le vide profond de ton cœur, incapable de répondre à ton désir du bonheur.
Il en est de même des richesses, et des honneurs, souvent tant désirés ; dès qu'on les a, on voit que les satisfactions qu'ils nous donnent sont terriblement passagères et superficielles, incapables elles aussi de combler le vide de notre cœur ; notre intelligence nous dit : toutes ces richesses et ces honneurs ne sont encore qu'un pauvre bien fini, de la fumée, que le moindre vent dissipe.
Il faut en dire autant du pouvoir, de la gloire, car celui qui s'élève sur la roue de la fortune, à peine est-il arrivé au sommet, qu'il commence à redescendre, il doit faire place à d'autres, il sera bientôt un astre qui s'éteint. Et même si les plus fortunés gardent quelque temps le pouvoir et la gloire, ils ne peuvent y trouver le vrai bonheur, mais souvent ils y trouvent tant d'inquiétudes et d'ennuis, qu'ils aspirent à se retirer de tout.
Il faut en dire autant de la connaissance des sciences ; ce n'est là qu'un bien fort limité : le vrai, fût-il complet et sans mélange d'erreur, est le bien de l'intelligence, mais il n'est pas le bien de tout l'homme; en dehors de l'intelligence, le cœur, la volonté ont aussi leurs besoins spirituels profonds, et s'ils ne sont pas satisfaits, il n'y a point de vrai bonheur.
Le trouverons-nous dans une amitié très pure et très haute ? Elle nous apportera certes de grandes joies, parfois très intimes, bien sûr ; mais nous avons une intelligence qui conçoit le bien universel, sans limite, et ici aussi elle ne tardera pas à constater que cette amitié très pure et très haute n'est encore qu'un bien fini. On se rappellera le mot de sainte Catherine de Sienne : « Voulez-vous pouvoir vous désaltérer longtemps à cette coupe d'une véritable amitié, laissez-la sous la source d'eau vive, autrement vous l'aurez bien vite épuisée, elle ne pourra plus répondre à votre soif ». Si elle y répond, c'est que la personne aimée devient meilleure, et pour le devenir elle a besoin de recevoir une bonté nouvelle d'une source supérieure.
Même s'il nous était donné de voir un ange, de le voir immédiatement dans sa beauté suprasensible, purement spirituelle, nous serions d'abord émerveillés ; mais notre intelligence, qui conçoit le bien universel et sans limite, ne tarderait pas à nous dire : ce n'est là encore qu'un bien fini, et par là même très pauvre en comparaison du Bien-même, sans limite, et sans mélange d'imperfection. Deux biens finis, si inégaux soient-ils, sont également distants de l'Infini ; en ce sens, l'ange et le grain de sable sont également infimes.
Source : Livres-mystiques.com
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ami de la Miséricorde
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I - Le fait d'expérience: Le vrai bonheur, solide et durable, n'est pas dans les biens qui passent
Qui d'entre nous n'a constaté ce fait dans sa vie profonde ? Si nous sommes malades, nous désirons naturellement la santé, comme un grand bien, et dès que nous sommes guéris, si heureux soyons-nous de notre guérison, nous constatons que la santé ne suffit pas à notre bonheur, et qu'elle ne donne pas la paix de l'âme; on peut être en parfaite santé, et accablé de tristesse. - Il en est de même des plaisirs des sens : loin de suffire à nous donner le bonheur, pour peu qu'on en abuse, ils jettent dans le désenchantement et le dégoût, parce qu'aussitôt notre intelligence, qui conçoit le bien universel et sans limite, nous dit : cette délectation sensible, qui t'attirait tout à l'heure, tu vois, maintenant que tu l'as obtenue, qu'elle est la pauvreté même, et incapable de satisfaire le vide profond de ton cœur, incapable de répondre à ton désir du bonheur.
Il en est de même des richesses, et des honneurs, souvent tant désirés ; dès qu'on les a, on voit que les satisfactions qu'ils nous donnent sont terriblement passagères et superficielles, incapables elles aussi de combler le vide de notre cœur ; notre intelligence nous dit : toutes ces richesses et ces honneurs ne sont encore qu'un pauvre bien fini, de la fumée, que le moindre vent dissipe.
Il faut en dire autant du pouvoir, de la gloire, car celui qui s'élève sur la roue de la fortune, à peine est-il arrivé au sommet, qu'il commence à redescendre, il doit faire place à d'autres, il sera bientôt un astre qui s'éteint. Et même si les plus fortunés gardent quelque temps le pouvoir et la gloire, ils ne peuvent y trouver le vrai bonheur, mais souvent ils y trouvent tant d'inquiétudes et d'ennuis, qu'ils aspirent à se retirer de tout.
Il faut en dire autant de la connaissance des sciences ; ce n'est là qu'un bien fort limité : le vrai, fût-il complet et sans mélange d'erreur, est le bien de l'intelligence, mais il n'est pas le bien de tout l'homme; en dehors de l'intelligence, le cœur, la volonté ont aussi leurs besoins spirituels profonds, et s'ils ne sont pas satisfaits, il n'y a point de vrai bonheur.
Le trouverons-nous dans une amitié très pure et très haute ? Elle nous apportera certes de grandes joies, parfois très intimes, bien sûr ; mais nous avons une intelligence qui conçoit le bien universel, sans limite, et ici aussi elle ne tardera pas à constater que cette amitié très pure et très haute n'est encore qu'un bien fini. On se rappellera le mot de sainte Catherine de Sienne : « Voulez-vous pouvoir vous désaltérer longtemps à cette coupe d'une véritable amitié, laissez-la sous la source d'eau vive, autrement vous l'aurez bien vite épuisée, elle ne pourra plus répondre à votre soif ». Si elle y répond, c'est que la personne aimée devient meilleure, et pour le devenir elle a besoin de recevoir une bonté nouvelle d'une source supérieure.
Même s'il nous était donné de voir un ange, de le voir immédiatement dans sa beauté suprasensible, purement spirituelle, nous serions d'abord émerveillés ; mais notre intelligence, qui conçoit le bien universel et sans limite, ne tarderait pas à nous dire : ce n'est là encore qu'un bien fini, et par là même très pauvre en comparaison du Bien-même, sans limite, et sans mélange d'imperfection. Deux biens finis, si inégaux soient-ils, sont également distants de l'Infini ; en ce sens, l'ange et le grain de sable sont également infimes.
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CHAPITRE IV
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
II - Le principe, qui permet de s'élever à Dieu
Ce désir naturel du bonheur, que nous portons tous en nous, ne peut-il donc pas être satisfait ?
Se peut-il qu'un désir NATUREL soit vain, chimérique, sans aucun sens, sans aucune portée ?
On comprend qu'un désir né d'une fantaisie de l'imagination ou d'une erreur de la raison, comme le désir d'avoir des ailes, soit chimérique. Mais un désir fondé sur la nature et immédiatement, sans l'intermédiaire d'aucun jugement conditionnel, comment le serait-il ? Le désir du bonheur n'est pas une simple velléité conditionnelle, il est inné ou immédiatement fondé sur la nature, qui est quelque chose de stable, de ferme, qui se retrouve chez tous les hommes de tous les pays et de tous les temps. Bien plus, c'est la nature même de notre volonté, qui, avant tout acte, est une faculté appétitive du bien dans son universalité.
La nature de notre volonté pas plus que celle de notre intelligence ne peut être le résultat du hasard, d'une rencontre fortuite, puisque notre volonté, comme notre intelligence, est un principe d'opération tout à fait simple, et nullement composé d'éléments divers que le hasard aurait pu réunir.
Le désir naturel de cette volonté peut-il être chimérique ?
Déjà le désir naturel des êtres inférieurs à nous n'est pas vain, comme le remarque du point de vue expérimental le naturaliste. Le désir naturel de l'herbivore est de trouver de l'herbe, et il la trouve; celui du carnivore est de trouver de la chair à manger, et il la trouve. Le désir naturel de l'homme est d'être heureux et le vrai bonheur ne se trouve de fait et ne peut se trouver en aucun bien limité; ce vrai bonheur est-il introuvable ? Le désir naturel de l'homme serait-il donc trompeur, sans finalité, alors que le désir naturel des êtres inférieurs n'est pas vain ?
Mais il n'y a pas là seulement un argument de naturaliste, fondé sur l'expérience et l'analogie de notre désir naturel avec celui des êtres inférieurs. Il y a là un argument métaphysique fondé sur la certitude de la valeur absolue du principe de finalité.
Si le désir naturel du vrai bonheur est chimérique, c'est toute l'activité humaine, inspirée par ce désir, qui serait sans finalité, sans raison d'être, contraire à ce principe nécessaire et évident : « Tout agent agit pour une fin ». Pour entendre la vérité de ce principe, ainsi formulé par Aristote, il suffit de comprendre ses termes : Tout agent quel qu'il soit, conscient ou inconscient, tend à quelque chose de déterminé qui lui convient. Or la fin est précisément le bien déterminé auquel tend l'action d'un agent, ou le mouvement d'un mobile.
Ce principe de soi évident pour qui entend le sens des mots agent et fin, se démontre aussi par l'absurde, car autrement, dit saint Thomas (Ia-IIae q. 1, a. 2) : « il n'y aurait pour l'agent, aucune raison d'agir, plutôt que de ne pas agir, et aucune raison D'AGIR AINSI, plutôt qu'autrement », de désirer ceci plutôt qu'autre chose.
S'il n'y avait pas de finalité naturelle, si tout agent naturel n'agissait pas pour une fin, il n'y aurait aucune raison pour l'œil de voir au lieu d'entendre ou de savourer, pour les ailes de l'oiseau de le faire voler au lieu de le faire marcher ou nager, pour l'intelligence aucune raison de connaître plutôt que de vouloir. Alors tout deviendrait sans raison d'être et serait inintelligible. Il n'y aurait aucune raison pour la pierre de tomber au lieu de monter, aucune raison pour les corps de s'attirer au lieu de se repousser et de se disperser en détruisant toute l'harmonie de l'univers.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
II - Le principe, qui permet de s'élever à Dieu
Ce désir naturel du bonheur, que nous portons tous en nous, ne peut-il donc pas être satisfait ?
Se peut-il qu'un désir NATUREL soit vain, chimérique, sans aucun sens, sans aucune portée ?
On comprend qu'un désir né d'une fantaisie de l'imagination ou d'une erreur de la raison, comme le désir d'avoir des ailes, soit chimérique. Mais un désir fondé sur la nature et immédiatement, sans l'intermédiaire d'aucun jugement conditionnel, comment le serait-il ? Le désir du bonheur n'est pas une simple velléité conditionnelle, il est inné ou immédiatement fondé sur la nature, qui est quelque chose de stable, de ferme, qui se retrouve chez tous les hommes de tous les pays et de tous les temps. Bien plus, c'est la nature même de notre volonté, qui, avant tout acte, est une faculté appétitive du bien dans son universalité.
La nature de notre volonté pas plus que celle de notre intelligence ne peut être le résultat du hasard, d'une rencontre fortuite, puisque notre volonté, comme notre intelligence, est un principe d'opération tout à fait simple, et nullement composé d'éléments divers que le hasard aurait pu réunir.
Le désir naturel de cette volonté peut-il être chimérique ?
Déjà le désir naturel des êtres inférieurs à nous n'est pas vain, comme le remarque du point de vue expérimental le naturaliste. Le désir naturel de l'herbivore est de trouver de l'herbe, et il la trouve; celui du carnivore est de trouver de la chair à manger, et il la trouve. Le désir naturel de l'homme est d'être heureux et le vrai bonheur ne se trouve de fait et ne peut se trouver en aucun bien limité; ce vrai bonheur est-il introuvable ? Le désir naturel de l'homme serait-il donc trompeur, sans finalité, alors que le désir naturel des êtres inférieurs n'est pas vain ?
Mais il n'y a pas là seulement un argument de naturaliste, fondé sur l'expérience et l'analogie de notre désir naturel avec celui des êtres inférieurs. Il y a là un argument métaphysique fondé sur la certitude de la valeur absolue du principe de finalité.
Si le désir naturel du vrai bonheur est chimérique, c'est toute l'activité humaine, inspirée par ce désir, qui serait sans finalité, sans raison d'être, contraire à ce principe nécessaire et évident : « Tout agent agit pour une fin ». Pour entendre la vérité de ce principe, ainsi formulé par Aristote, il suffit de comprendre ses termes : Tout agent quel qu'il soit, conscient ou inconscient, tend à quelque chose de déterminé qui lui convient. Or la fin est précisément le bien déterminé auquel tend l'action d'un agent, ou le mouvement d'un mobile.
Ce principe de soi évident pour qui entend le sens des mots agent et fin, se démontre aussi par l'absurde, car autrement, dit saint Thomas (Ia-IIae q. 1, a. 2) : « il n'y aurait pour l'agent, aucune raison d'agir, plutôt que de ne pas agir, et aucune raison D'AGIR AINSI, plutôt qu'autrement », de désirer ceci plutôt qu'autre chose.
S'il n'y avait pas de finalité naturelle, si tout agent naturel n'agissait pas pour une fin, il n'y aurait aucune raison pour l'œil de voir au lieu d'entendre ou de savourer, pour les ailes de l'oiseau de le faire voler au lieu de le faire marcher ou nager, pour l'intelligence aucune raison de connaître plutôt que de vouloir. Alors tout deviendrait sans raison d'être et serait inintelligible. Il n'y aurait aucune raison pour la pierre de tomber au lieu de monter, aucune raison pour les corps de s'attirer au lieu de se repousser et de se disperser en détruisant toute l'harmonie de l'univers.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange
CHAPITRE IV
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
II - Le principe, qui permet de s'élever à Dieu
Le principe de finalité a une nécessité et une valeur absolues, qui ne sont pas moins certaines que celles du principe de causalité efficiente « tout ce qui arrive et tout être contingent exigent une cause efficiente » et en dernière analyse tout ce qui arrive exige une cause efficiente, non causée, qui soit son agir, son action, et donc qui soit son existence même, puisque l'agir suit l'être, et le mode d'agir le mode d'être.
Ces deux principes de causalité efficiente et de finalité sont également certains, d'une certitude non seulement physique, mais métaphysique, avant que nous ayons démontré l'existence de Dieu. Et même l'efficience ne se conçoit pas sans la finalité ; elle serait, nous venons de le voir, sans raison d'être, et donc inintelligible.
III - Le terme de cette ascension
Notre désir naturel du bonheur a donc une finalité; il tend vers un bien. Serait-ce seulement vers un bien irréel, ou vers un bien réel mais inaccessible ? Tout d'abord ce bien, auquel tend notre désir naturel, n'est pas seulement une idée de notre esprit, car comme l'a dit plusieurs fois Aristote, tandis que le vrai est formellement dans l'esprit qui juge, le bien est formellement dans les choses. Lorsque nous désirons la nourriture, il ne suffit pas d'en avoir l'idée; ce n'est pas l'idée du pain qui nourrit, mais le pain lui-même. Et donc le désir naturel de la volonté, fondé non pas sur l'imagination ou l'égarement de la raison, mais sur la nature même et de l'intelligence et de la volonté, tend non pas vers l'idée du bien, mais vers un bien réel; autrement ce n'est plus un désir, et surtout un désir naturel.
On dira peut-être que l'idée universelle de bien nous porte à chercher le bonheur dans la collection ou la succession de tous les biens finis, qui nous attirent : santé, plaisirs du corps, richesses, honneurs, joie de 1a connaissance scientifique, de l'art, de l'amitié. Ceux qui dans une course folle veulent jouir de tous les biens finis soit simultanément, soit du moins successivement, semblent penser un moment que c'est là le vrai bonheur.
Mais l'expérience et la raison nous détrompent. Le vide du cœur subsiste toujours, manifesté par l'ennui; et l'intelligence nous dit que la collection même simultanée de tous ces biens finis et mêlés d'imperfection ne peut pas plus constituer le Bien même, conçu et désiré par nous, qu'une multitude innombrable d'idiots ne saurait valoir un homme de génie.
La quantité ne fait rien à l'affaire ; il s'agit ici de la qualité du bien; même si l'on multipliait à l'infini tous les biens finis, ils ne constitueraient pas le Bien pur, sans mélange, que notre intelligence conçoit, et que par suite notre volonté désire. C'est là la raison profonde de l'ennui qu'éprouvent les mondains, qu'ils traînent sur toutes les plages du monde; ils se portent vers une créature, puis vers une autre, et ainsi de suite, sans qu'ils soient jamais vraiment satisfaits, et véritablement heureux.
Mais alors, si notre intelligence est capable de concevoir le bien universel ou sans limites, notre volonté, éclairée par elle, a aussi une amplitude et une profondeur illimitée, et son désir naturel, qui appelle non pas l'idée du bien, mais un bien réel, peut-il être vain, et chimérique ?
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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II - Le principe, qui permet de s'élever à Dieu
Le principe de finalité a une nécessité et une valeur absolues, qui ne sont pas moins certaines que celles du principe de causalité efficiente « tout ce qui arrive et tout être contingent exigent une cause efficiente » et en dernière analyse tout ce qui arrive exige une cause efficiente, non causée, qui soit son agir, son action, et donc qui soit son existence même, puisque l'agir suit l'être, et le mode d'agir le mode d'être.
Ces deux principes de causalité efficiente et de finalité sont également certains, d'une certitude non seulement physique, mais métaphysique, avant que nous ayons démontré l'existence de Dieu. Et même l'efficience ne se conçoit pas sans la finalité ; elle serait, nous venons de le voir, sans raison d'être, et donc inintelligible.
III - Le terme de cette ascension
Notre désir naturel du bonheur a donc une finalité; il tend vers un bien. Serait-ce seulement vers un bien irréel, ou vers un bien réel mais inaccessible ? Tout d'abord ce bien, auquel tend notre désir naturel, n'est pas seulement une idée de notre esprit, car comme l'a dit plusieurs fois Aristote, tandis que le vrai est formellement dans l'esprit qui juge, le bien est formellement dans les choses. Lorsque nous désirons la nourriture, il ne suffit pas d'en avoir l'idée; ce n'est pas l'idée du pain qui nourrit, mais le pain lui-même. Et donc le désir naturel de la volonté, fondé non pas sur l'imagination ou l'égarement de la raison, mais sur la nature même et de l'intelligence et de la volonté, tend non pas vers l'idée du bien, mais vers un bien réel; autrement ce n'est plus un désir, et surtout un désir naturel.
On dira peut-être que l'idée universelle de bien nous porte à chercher le bonheur dans la collection ou la succession de tous les biens finis, qui nous attirent : santé, plaisirs du corps, richesses, honneurs, joie de 1a connaissance scientifique, de l'art, de l'amitié. Ceux qui dans une course folle veulent jouir de tous les biens finis soit simultanément, soit du moins successivement, semblent penser un moment que c'est là le vrai bonheur.
Mais l'expérience et la raison nous détrompent. Le vide du cœur subsiste toujours, manifesté par l'ennui; et l'intelligence nous dit que la collection même simultanée de tous ces biens finis et mêlés d'imperfection ne peut pas plus constituer le Bien même, conçu et désiré par nous, qu'une multitude innombrable d'idiots ne saurait valoir un homme de génie.
La quantité ne fait rien à l'affaire ; il s'agit ici de la qualité du bien; même si l'on multipliait à l'infini tous les biens finis, ils ne constitueraient pas le Bien pur, sans mélange, que notre intelligence conçoit, et que par suite notre volonté désire. C'est là la raison profonde de l'ennui qu'éprouvent les mondains, qu'ils traînent sur toutes les plages du monde; ils se portent vers une créature, puis vers une autre, et ainsi de suite, sans qu'ils soient jamais vraiment satisfaits, et véritablement heureux.
Mais alors, si notre intelligence est capable de concevoir le bien universel ou sans limites, notre volonté, éclairée par elle, a aussi une amplitude et une profondeur illimitée, et son désir naturel, qui appelle non pas l'idée du bien, mais un bien réel, peut-il être vain, et chimérique ?
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Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange
CHAPITRE IV
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
III - Le terme de cette ascension
Ce désir naturel, fondé, non pas sur notre imagination, mais sur notre nature, est ferme et immuable comme celle-ci. Il ne peut pas être plus vain que le désir de l'herbivore, que celui du carnivore; il ne peut pas être plus vain, que l'ordination naturelle de l'œil à la vision, de l'ouïe à l'audition, de l'intelligence à la connaissance. Et alors, si ce désir naturel du bonheur ne peut être vain, et s'il ne peut trouver de satisfaction dans aucun bien fini, ni dans la collection des biens finis, il faut dire de toute nécessité qu'il existe un Bien pur, sans mélange, le Bien même ou le Souverain Bien, seul capable de répondre à notre aspiration ; autrement l'amplitude universelle de notre volonté serait une absurdité psychologique, une chose radicalement inintelligible, sans raison d'être.
IV - Ce que n'exige pas notre nature
S'ensuit-il que notre désir naturel du bonheur exige que nous arrivions à la vision immédiate de Dieu, souverain Bien ?
Nullement. Cette vision immédiate de l'essence divine est essentiellement surnaturelle et donc gratuite, nullement due à notre nature, ni à la nature angélique.
En ce sens saint Paul nous dit : « L'œil de l'homme ne peut voir, son oreille ne peut entendre, ni son cœur naturellement désirer les choses que Dieu prépare à ceux qui l'aiment. Mais le Saint-Esprit nous les a révélées, car l'Esprit pénètre tout, même les profondeurs de Dieu » I Cor., II, 9.
Mais très au-dessous de la vision immédiate de l'essence divine, et très au-dessous de la foi chrétienne, il y a la connaissance naturelle de Dieu, auteur de la nature, celle que nous donnent les preuves de son existence.
Et si le péché originel n'avait pas affaibli nos forces morales, cette connaissance naturelle de Dieu nous permettrait d'arriver à un amour naturel efficace de Dieu, auteur de la nature, de Dieu, souverain Bien, naturellement connu.
Or dans cette connaissance naturelle, et dans cet amour naturel et efficace de Dieu, l'homme, s'il avait été créé dans un état purement naturel, aurait trouvé le vrai bonheur, non pas la béatitude absolument parfaite, qui est la béatitude surnaturelle ou la vision immédiate de Dieu, mais pourtant un vrai bonheur solide et durable, car cet amour naturel de Dieu, s'il est efficace, oriente vraiment notre vie vers Lui et nous donne en un sens vrai de nous reposer en Lui, du moins dans l'ordre naturel, dans l'ordre de ce qui est dû à notre nature. Il en eût été ainsi, dans un état naturel, pour l'âme immortelle des justes, après l'épreuve de cette vie. L'âme désire naturellement vivre toujours et ce désir naturel ne saurait être vain (cf. S. Thomas, Ia, q. 75, a. 6, c. fin).
Mais gratuitement nous avons reçu beaucoup plus nous avons reçu la grâce, germe de la gloire, et avec elle la foi surnaturelle et l'amour surnaturel de Dieu, auteur non plus seulement de la nature, mais de la grâce.
Source : Livres-mystiques.com
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DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
III - Le terme de cette ascension
Ce désir naturel, fondé, non pas sur notre imagination, mais sur notre nature, est ferme et immuable comme celle-ci. Il ne peut pas être plus vain que le désir de l'herbivore, que celui du carnivore; il ne peut pas être plus vain, que l'ordination naturelle de l'œil à la vision, de l'ouïe à l'audition, de l'intelligence à la connaissance. Et alors, si ce désir naturel du bonheur ne peut être vain, et s'il ne peut trouver de satisfaction dans aucun bien fini, ni dans la collection des biens finis, il faut dire de toute nécessité qu'il existe un Bien pur, sans mélange, le Bien même ou le Souverain Bien, seul capable de répondre à notre aspiration ; autrement l'amplitude universelle de notre volonté serait une absurdité psychologique, une chose radicalement inintelligible, sans raison d'être.
IV - Ce que n'exige pas notre nature
S'ensuit-il que notre désir naturel du bonheur exige que nous arrivions à la vision immédiate de Dieu, souverain Bien ?
Nullement. Cette vision immédiate de l'essence divine est essentiellement surnaturelle et donc gratuite, nullement due à notre nature, ni à la nature angélique.
En ce sens saint Paul nous dit : « L'œil de l'homme ne peut voir, son oreille ne peut entendre, ni son cœur naturellement désirer les choses que Dieu prépare à ceux qui l'aiment. Mais le Saint-Esprit nous les a révélées, car l'Esprit pénètre tout, même les profondeurs de Dieu » I Cor., II, 9.
Mais très au-dessous de la vision immédiate de l'essence divine, et très au-dessous de la foi chrétienne, il y a la connaissance naturelle de Dieu, auteur de la nature, celle que nous donnent les preuves de son existence.
Et si le péché originel n'avait pas affaibli nos forces morales, cette connaissance naturelle de Dieu nous permettrait d'arriver à un amour naturel efficace de Dieu, auteur de la nature, de Dieu, souverain Bien, naturellement connu.
Or dans cette connaissance naturelle, et dans cet amour naturel et efficace de Dieu, l'homme, s'il avait été créé dans un état purement naturel, aurait trouvé le vrai bonheur, non pas la béatitude absolument parfaite, qui est la béatitude surnaturelle ou la vision immédiate de Dieu, mais pourtant un vrai bonheur solide et durable, car cet amour naturel de Dieu, s'il est efficace, oriente vraiment notre vie vers Lui et nous donne en un sens vrai de nous reposer en Lui, du moins dans l'ordre naturel, dans l'ordre de ce qui est dû à notre nature. Il en eût été ainsi, dans un état naturel, pour l'âme immortelle des justes, après l'épreuve de cette vie. L'âme désire naturellement vivre toujours et ce désir naturel ne saurait être vain (cf. S. Thomas, Ia, q. 75, a. 6, c. fin).
Mais gratuitement nous avons reçu beaucoup plus nous avons reçu la grâce, germe de la gloire, et avec elle la foi surnaturelle et l'amour surnaturel de Dieu, auteur non plus seulement de la nature, mais de la grâce.
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CHAPITRE IV
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
IV - Ce que n'exige pas notre nature
Et alors, pour nous chrétiens, la preuve dont nous venons de parler se confirme grandement par le bonheur ou la paix que nous trouvons dès ici-bas dans l'union à Dieu.
Très au-dessus de ce que peut entrevoir la raison philosophique, sans posséder encore la béatitude parfaite, qui est celle du ciel, nous avons trouvé le vrai bonheur, dans la mesure où nous aimons sincèrement, efficacement, généreusement le Souverain Bien par-dessus tout, plus que nous-mêmes et que toute autre créature, dans la mesure où nous ordonnons chaque jour plus profondément toute notre vie vers lui.
Malgré les tristesses parfois accablantes de la vie présente, nous avons trouvé le vrai bonheur ou la paix, du moins au sommet de l'âme, lorsque nous aimons Dieu par-dessus tout, car la paix est la tranquillité de l'ordre, et nous sommes alors unis au principe même de tout ordre et de toute vie.
Notre preuve se confirme ainsi grandement par l'expérience profonde de la vie chrétienne en laquelle se réalise la parole de Notre-Seigneur : « Pacem relinquo vobis, pacem meam do vobis, non quomodo mundus dat, ego do vobis » Jean, XIV, 27.
Le Sauveur nous a donné la paix, non pas par l'accumulation des plaisirs, des richesses, des honneurs, de la gloire, du pouvoir; mais par l'union à Dieu.
Et il nous a tellement donné cette paix solide et durable, qu'il peut nous la conserver et nous la conserve, comme il l'a prédit, au milieu même des persécutions : « Beati pauperes... Beati qui esuriunt et sitiunt iustitiam... Beati qui persecutionem patiuntur propter iustitiam, quoniam ipsorum est regnum coelorum » Matth.,V, 10.
Déjà le royaume des cieux est à eux, en ce sens que, dans l'union à Dieu, ils ont par la charité, la vie éternelle commencée, « inchoatio vitæ æternæ », IIa-IIae, q. 24, a. 3, 2m.
Épicure se vantait de pouvoir par sa doctrine donner le bonheur à ses disciples même dans le taureau de Phalaris, dans le taureau d'airain porté au rouge où l'on mourait carbonisé.
Seul Jésus a pu réaliser pareille chose dans les martyrs en leur donnant la paix et le vrai bonheur par l'union à Dieu au milieu même de leurs tourments.
Dans la mesure où l'on possède cette union à Dieu, la preuve dont nous venons de parler reçoit une très grande confirmation, par l'expérience spirituelle profonde, car Dieu, par le don de sagesse, daigne alors se faire sentir à nous comme la vie de notre vie « Ipse enim Spiritus testimonium reddit spiritui nostro, quod sumus filii Dei » Rom., VIII, 16.
Dieu se fait sentir à nous comme le principe de l'amour filial qu'il nous inspire pour lui.
Source : Livres-mystiques.com
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ami de la Miséricorde
DIEU, SOUVERAIN BIEN ET LE DÉSIR DU BONHEUR
IV - Ce que n'exige pas notre nature
Et alors, pour nous chrétiens, la preuve dont nous venons de parler se confirme grandement par le bonheur ou la paix que nous trouvons dès ici-bas dans l'union à Dieu.
Très au-dessus de ce que peut entrevoir la raison philosophique, sans posséder encore la béatitude parfaite, qui est celle du ciel, nous avons trouvé le vrai bonheur, dans la mesure où nous aimons sincèrement, efficacement, généreusement le Souverain Bien par-dessus tout, plus que nous-mêmes et que toute autre créature, dans la mesure où nous ordonnons chaque jour plus profondément toute notre vie vers lui.
Malgré les tristesses parfois accablantes de la vie présente, nous avons trouvé le vrai bonheur ou la paix, du moins au sommet de l'âme, lorsque nous aimons Dieu par-dessus tout, car la paix est la tranquillité de l'ordre, et nous sommes alors unis au principe même de tout ordre et de toute vie.
Notre preuve se confirme ainsi grandement par l'expérience profonde de la vie chrétienne en laquelle se réalise la parole de Notre-Seigneur : « Pacem relinquo vobis, pacem meam do vobis, non quomodo mundus dat, ego do vobis » Jean, XIV, 27.
Le Sauveur nous a donné la paix, non pas par l'accumulation des plaisirs, des richesses, des honneurs, de la gloire, du pouvoir; mais par l'union à Dieu.
Et il nous a tellement donné cette paix solide et durable, qu'il peut nous la conserver et nous la conserve, comme il l'a prédit, au milieu même des persécutions : « Beati pauperes... Beati qui esuriunt et sitiunt iustitiam... Beati qui persecutionem patiuntur propter iustitiam, quoniam ipsorum est regnum coelorum » Matth.,V, 10.
Déjà le royaume des cieux est à eux, en ce sens que, dans l'union à Dieu, ils ont par la charité, la vie éternelle commencée, « inchoatio vitæ æternæ », IIa-IIae, q. 24, a. 3, 2m.
Épicure se vantait de pouvoir par sa doctrine donner le bonheur à ses disciples même dans le taureau de Phalaris, dans le taureau d'airain porté au rouge où l'on mourait carbonisé.
Seul Jésus a pu réaliser pareille chose dans les martyrs en leur donnant la paix et le vrai bonheur par l'union à Dieu au milieu même de leurs tourments.
Dans la mesure où l'on possède cette union à Dieu, la preuve dont nous venons de parler reçoit une très grande confirmation, par l'expérience spirituelle profonde, car Dieu, par le don de sagesse, daigne alors se faire sentir à nous comme la vie de notre vie « Ipse enim Spiritus testimonium reddit spiritui nostro, quod sumus filii Dei » Rom., VIII, 16.
Dieu se fait sentir à nous comme le principe de l'amour filial qu'il nous inspire pour lui.
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Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange
CHAPITRE V
DIEU, FONDEMENT SUPRÊME DU DEVOIR
Nous avons vu la preuve de l'existence du Souverain Bien, qui se tire de notre désir naturel du bonheur.
Elle revient, disions-nous, à ceci :
Un désir naturel, fondé non pas sur l'imagination ou l'égarement de la raison, mais sur notre nature même, commune à tous les hommes, un tel désir naturel ne peut être vain, chimérique, trompeur; c'est-à-dire : il ne peut tendre à un bien irréel ou inaccessible.
Or tout homme désire naturellement être heureux, et le vrai bonheur ne se trouve en aucun bien fini ou limité, car notre intelligence, concevant le bien universel et sans limites, nous le fait naturellement désirer.
Il faut donc qu'il existe un Bien sans limite, Bien pur, sans mélange de non-bien ou d'imperfection ; sans quoi l'amplitude universelle de notre volonté serait une absurdité psychologique, un non-sens absolu.
Comme l'herbivore trouve l'herbe dont il a besoin, et le carnivore la proie nécessaire à sa subsistance, le désir naturel de l'homme ne peut rester vain; le vrai bonheur, naturellement désiré, doit être possible, et c'est seulement dans la connaissance et l'amour du souverain Bien ou de Dieu qu'il peut se trouver. Donc Dieu existe.
Il y a une autre preuve de l'existence de Dieu qui a pour point de départ, non plus notre désir du bonheur, mais l'obligation morale ou l'ordination de notre volonté au bien moral. Cette preuve conduit au Souverain Bien, non plus seulement comme désirable par-dessus tout, mais en tant qu'il a DROIT à être aimé, exige l'amour et fonde le devoir.
I - L'ordination de notre volonté au bien moral
Cette preuve a son point de départ dans la conscience humaine.
Tous, même ceux qui doutent encore de l'existence de Dieu, saisissent au moins d'une façon confuse qu'il faut faire le bien et éviter le mal. Pour voir cette vérité, il suffit d'avoir la notion de bien, et de distinguer, comme le fait le sens commun :
1° le bien sensible ou simplement délectable, 2° le bien utile en vue d'une fin, et 3° le bien honnête ou moral, qui est bien en soi, indépendamment de la jouissance ou de l'utilité qui en dérivent. L'animal se repose dans le bien sensible délectable, et par l'instinct il utilise le bien sensible utile sans en voir la raison d'être dans la fin pour laquelle il l'emploie.
L'hirondelle ramasse une paille pour faire son nid, sans savoir que cette paille est utile à son nid.L'homme seul, par sa raison, connaît l'utilité ou la raison d'être du moyen dans la fin.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
DIEU, FONDEMENT SUPRÊME DU DEVOIR
Nous avons vu la preuve de l'existence du Souverain Bien, qui se tire de notre désir naturel du bonheur.
Elle revient, disions-nous, à ceci :
Un désir naturel, fondé non pas sur l'imagination ou l'égarement de la raison, mais sur notre nature même, commune à tous les hommes, un tel désir naturel ne peut être vain, chimérique, trompeur; c'est-à-dire : il ne peut tendre à un bien irréel ou inaccessible.
Or tout homme désire naturellement être heureux, et le vrai bonheur ne se trouve en aucun bien fini ou limité, car notre intelligence, concevant le bien universel et sans limites, nous le fait naturellement désirer.
Il faut donc qu'il existe un Bien sans limite, Bien pur, sans mélange de non-bien ou d'imperfection ; sans quoi l'amplitude universelle de notre volonté serait une absurdité psychologique, un non-sens absolu.
Comme l'herbivore trouve l'herbe dont il a besoin, et le carnivore la proie nécessaire à sa subsistance, le désir naturel de l'homme ne peut rester vain; le vrai bonheur, naturellement désiré, doit être possible, et c'est seulement dans la connaissance et l'amour du souverain Bien ou de Dieu qu'il peut se trouver. Donc Dieu existe.
Il y a une autre preuve de l'existence de Dieu qui a pour point de départ, non plus notre désir du bonheur, mais l'obligation morale ou l'ordination de notre volonté au bien moral. Cette preuve conduit au Souverain Bien, non plus seulement comme désirable par-dessus tout, mais en tant qu'il a DROIT à être aimé, exige l'amour et fonde le devoir.
I - L'ordination de notre volonté au bien moral
Cette preuve a son point de départ dans la conscience humaine.
Tous, même ceux qui doutent encore de l'existence de Dieu, saisissent au moins d'une façon confuse qu'il faut faire le bien et éviter le mal. Pour voir cette vérité, il suffit d'avoir la notion de bien, et de distinguer, comme le fait le sens commun :
1° le bien sensible ou simplement délectable, 2° le bien utile en vue d'une fin, et 3° le bien honnête ou moral, qui est bien en soi, indépendamment de la jouissance ou de l'utilité qui en dérivent. L'animal se repose dans le bien sensible délectable, et par l'instinct il utilise le bien sensible utile sans en voir la raison d'être dans la fin pour laquelle il l'emploie.
L'hirondelle ramasse une paille pour faire son nid, sans savoir que cette paille est utile à son nid.L'homme seul, par sa raison, connaît l'utilité ou la raison d'être du moyen dans la fin.
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CHAPITRE V
DIEU, FONDEMENT SUPRÊME DU DEVOIR
1 -L'ordination de notre volonté au bien moral
Seul aussi il connaît et peut aimer le bien honnête et entendre cette vérité morale : « il faut faire le bien et éviter le mal ». L'imagination de l'animal pourrait être perfectionnée toujours dans son ordre par le dressage, et jamais elle n'arriverait à saisir cette vérité.
Mais par contre tout homme, si peu cultivé qu'il soit, la saisit dès qu'il arrive à l'âge de raison. Tout homme arrivé au plein usage de la raison, connaît cette distinction des trois genres de bien, sans savoir toujours l'exprimer. Tous voient qu'un fruit savoureux est un bien sensible, délectable, un bien physique qui n'a rien à voir avec le bien moral, et qu'on peut user de ce fruit d'une façon soit moralement bonne soit moralement mauvaise; le délectable de soi n'est donc pas moral. Tous savent de même qu'un remède fort amer est un bien non pas délectable, mais utile, en vue d'une fin, en tant qu'il peut nous rendre la santé. Ainsi l'argent est utile et on peut en user bien ou mal au point de vue moral. C'est une vérité des plus élémentaires du sens commun.
Enfin tout homme arrivé à l'âge de raison voit qu'au-dessus du bien sensible délectable et aussi de l'utile, il y a le bien honnête ou bien rationnel ou bien moral, qui est bien en soi, indépendamment du plaisir ou des avantages, des commodités, qui en résultent.
C'est ainsi que la vertu est un bien, par ex. la patience, le courage, la justice. La justice, c'est chose évidente pour tous, n'est pas un bien sensible, mais un bien spirituel, sans doute elle donne la joie à celui qui la pratique, mais elle est bonne indépendamment de cette joie, elle est bonne parce qu'elle est raisonnable, conforme à la droite raison. Nous comprenons que nous devons pratiquer la justice, non pas seulement pour son utilité, pour éviter les inconvénients de l'injustice, mais pour elle-même; si bien que nous devons pratiquer la justice et éviter l'injustice, surtout l'injustice grave, même si la mort devait s'ensuivre.
C'est là une perfection de l'homme, comme homme, c'est-à-dire comme raisonnable, et non pas comme animal. De même il est bien en soi, indépendamment du plaisir qu'on y trouve et des avantages qu'on en retire, de connaître la vérité, de l'aimer par-dessus tout, d'agir en tout selon la droite raison. Et même ce bien honnête, ou bien rationnel, nous apparaît comme la fin nécessaire de notre activité et par suite comme OBLIGATOIRE. Tout homme comprend qu'un être raisonnable DOIT avoir une conduite conforme à la droite raison, comme la droite raison est elle-même conforme aux principes absolus de l'être ou du réel : « ce qui est est, et ne peut pas en même temps être et ne pas être ». Le juste roué de coups par un chenapan prouve l'existence du monde intelligible supérieur au monde sensible lorsqu'il lui crie : Tu es le plus fort, mais ça ne prouve pas que tu aies raison. La justice est la justice.
C'est ainsi que le devoir s'exprime chez tous les peuples par des formules équivalentes : « Fais ce que dois, advienne que pourra ». « Il faut faire le bien et éviter le mal. » Le plaisir et l'intérêt doivent être subordonnés au devoir, le délectable et l'utile à l'honnête. C'est là une vérité éternelle, qui a toujours été vraie et le sera toujours.
Source : Livres-mystiques.com
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ami de la Miséricorde
DIEU, FONDEMENT SUPRÊME DU DEVOIR
1 -L'ordination de notre volonté au bien moral
Seul aussi il connaît et peut aimer le bien honnête et entendre cette vérité morale : « il faut faire le bien et éviter le mal ». L'imagination de l'animal pourrait être perfectionnée toujours dans son ordre par le dressage, et jamais elle n'arriverait à saisir cette vérité.
Mais par contre tout homme, si peu cultivé qu'il soit, la saisit dès qu'il arrive à l'âge de raison. Tout homme arrivé au plein usage de la raison, connaît cette distinction des trois genres de bien, sans savoir toujours l'exprimer. Tous voient qu'un fruit savoureux est un bien sensible, délectable, un bien physique qui n'a rien à voir avec le bien moral, et qu'on peut user de ce fruit d'une façon soit moralement bonne soit moralement mauvaise; le délectable de soi n'est donc pas moral. Tous savent de même qu'un remède fort amer est un bien non pas délectable, mais utile, en vue d'une fin, en tant qu'il peut nous rendre la santé. Ainsi l'argent est utile et on peut en user bien ou mal au point de vue moral. C'est une vérité des plus élémentaires du sens commun.
Enfin tout homme arrivé à l'âge de raison voit qu'au-dessus du bien sensible délectable et aussi de l'utile, il y a le bien honnête ou bien rationnel ou bien moral, qui est bien en soi, indépendamment du plaisir ou des avantages, des commodités, qui en résultent.
C'est ainsi que la vertu est un bien, par ex. la patience, le courage, la justice. La justice, c'est chose évidente pour tous, n'est pas un bien sensible, mais un bien spirituel, sans doute elle donne la joie à celui qui la pratique, mais elle est bonne indépendamment de cette joie, elle est bonne parce qu'elle est raisonnable, conforme à la droite raison. Nous comprenons que nous devons pratiquer la justice, non pas seulement pour son utilité, pour éviter les inconvénients de l'injustice, mais pour elle-même; si bien que nous devons pratiquer la justice et éviter l'injustice, surtout l'injustice grave, même si la mort devait s'ensuivre.
C'est là une perfection de l'homme, comme homme, c'est-à-dire comme raisonnable, et non pas comme animal. De même il est bien en soi, indépendamment du plaisir qu'on y trouve et des avantages qu'on en retire, de connaître la vérité, de l'aimer par-dessus tout, d'agir en tout selon la droite raison. Et même ce bien honnête, ou bien rationnel, nous apparaît comme la fin nécessaire de notre activité et par suite comme OBLIGATOIRE. Tout homme comprend qu'un être raisonnable DOIT avoir une conduite conforme à la droite raison, comme la droite raison est elle-même conforme aux principes absolus de l'être ou du réel : « ce qui est est, et ne peut pas en même temps être et ne pas être ». Le juste roué de coups par un chenapan prouve l'existence du monde intelligible supérieur au monde sensible lorsqu'il lui crie : Tu es le plus fort, mais ça ne prouve pas que tu aies raison. La justice est la justice.
C'est ainsi que le devoir s'exprime chez tous les peuples par des formules équivalentes : « Fais ce que dois, advienne que pourra ». « Il faut faire le bien et éviter le mal. » Le plaisir et l'intérêt doivent être subordonnés au devoir, le délectable et l'utile à l'honnête. C'est là une vérité éternelle, qui a toujours été vraie et le sera toujours.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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